Sami Aldeeb – Recette de grand-mère suisse pour intégrer les groupes religieux

En 1970, j’ai quitté mon pays d’origine, la Palestine, pour venir étudier en Suisse. Après une licence en droit à l’université de Fribourg, j’ai obtenu un  diplôme en sciences politiques à l’Institut universitaire de hautes études internationales de Genève, avec un mémoire  sur « Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, étude analytique de la doctrine marxiste-léniniste et de la position soviétique ». Ensuite, j’ai obtenu un doctorat en droit de l’Université de Fribourg avec une thèse de doctorat intitulée « L’impact de la religion sur l’ordre juridique, cas de l’Égypte, non-musulmans en pays d’Islam ». Par la suite, j’ai été responsable du droit arabe et musulman à l’Institut suisse de droit comparé de 1980 à 2009 et j’ai enseigné dans différentes universités suisses, italiennes et françaises en tant que professeur invité. Et aujourd’hui j’ai à mon actif une cinquantaine d’ouvrages, dont une édition arabe, une traduction française, une traduction anglaise et une traduction italienne du Coran (actuellement sous presse) par ordre chronologique, et un ouvrage sur les erreurs linguistiques du Coran. J’ai aussi traduit en arabe la constitution suisse pour la Confédération.

Cette introduction est pour vous indiquer que ce qui suit est fondé sur mes études, mes expériences et mes écrits. Il ne s’agit pas de propos gratuits, même si je n’ai jamais prétendu être infaillible.

En tant que suisse d’origine proche-orientale, j’ai réfléchi à la situation en Suisse, petit pays pauvre en ressources naturelles, divisé en 26 cantons jaloux et fiers de leur souveraineté, quatre communautés linguistiques et deux principales communautés religieuses traditionnellement antagonistes (catholiques et protestants). Pourquoi la cohabitation y a-t-elle fonctionné alors qu’au Proche-Orient, et notamment dans mon pays d’origine, la Palestine, les gens s’entre-tuent, et comment empêcher que la France, que je prends ici comme exemple, soit contaminée par le mal proche-oriental et ravagée par une guerre religieuse? Et ce qui je dis de la France peut être dit des autres pays occidentaux.

Sans doute, on dira que la prospérité économique suisse a joué un rôle, mais cette prospérité a été précédée par des réformes institutionnelles qui ont évité à la Suisse une guerre entre protestants et catholiques, en permettant l’intégration de ces deux communautés. Aucune prospérité économique ne peut intervenir dans un pays sans une cohabitation harmonieuse entre ses différentes communautés.

À refuser d’apprendre la leçon de l’histoire, on risque de répéter les erreurs du passé. Je vous propose donc un peu d’histoire.

La Suisse, comme d’autres pays européens, a connu ce qu’on appelle le Kulturkampf, traduit généralement en français par «Combat pour la civilisation». Ce qui rappelle étrangement l’expression «Clash of civilizations» rendue célèbre par Samuel P. Huntington.

Ce «Combat pour la civilisation» a débuté par un conflit entre le royaume prussien, et ensuite l’empire allemand sous la houlette de Bismarck d’une part, et d’autre part l’Église catholique sous Pie IX autour de la séparation de l’État et de la religion, conflit provoqué par l’adoption de lois régissant la vie en société dans l’État sans l’approbation préalable de l’Église et des autorités religieuses. C’était une extension du conflit opposant les philosophes des Lumières, qui plaçaient la raison au-dessus de la religion, et l’Église catholique qui plaidait pour la suprématie de la religion sur la raison et la science, affirmant qu’il appartenait à la religion (ou plus précisément aux autorités religieuses) de délimiter les compétences législatives de l’État.

Ce «Combat pour la civilisation» a commencé dans les années 1860, dans la région allemande de Baden, qui avait imposé aux prêtres un examen culturel visant à établir dans quelle mesure ils acceptaient l’État et lui prêtaient allégeance. Celui qui refusait cet examen se voyait interdire l’exercice de la fonction religieuse. En 1864, le Pape Pie IX a établi une liste de 80 erreurs en politique, en culture et en science, où figuraient la liberté d’expression, la liberté religieuse et la séparation entre l’État et la religion. Ensuite est venu le Concile Vatican I (1869-1870) affirmant l’autorité de l’Église, notamment à travers le dogme de l’infaillibilité du pape. Ce geste a été perçu par les libéraux comme une violation de la liberté de pensée et de religion. L’État a appuyé ce courant libéral et les relations entre l’Allemagne et le Vatican ont été rompues en 1872. Bismarck a alors promulgué plusieurs lois visant directement ou indirectement l’Église catholique. Ce fut le fondement de l’État moderne en Europe occidentale.

Le «Combat pour la civilisation» s’est étendu à la Suisse et a failli y provoquer un conflit armé entre les cantons catholiques et protestants. La Suisse a rompu ses relations avec le Vatican en 1873, en raison du dogme de l’infaillibilité du pape, et, une année plus tard, elle a adopté la Constitution de 1874 qui consolidait l’unité nationale et affirmait son indépendance à travers des normes visant à séparer l’État de la religion et à garantir les libertés individuelles. On citera ici les dispositions suivantes:

  • Retrait du registre des personnes des mains de l’Église et son transfert à l’État, qui le baptisa «Registre de l’état civil».
  • Imposition du mariage civil devant l’Office de l’état civil. Dès lors, une cérémonie religieuse ne pouvait intervenir qu’après le mariage civil. On ne parlait plus de mariage religieux, mais seulement de bénédiction religieuse. Un religieux qui donnait sa bénédiction avant le mariage civil était poursuivi, sanctionné pénalement, et son acte restait sans aucun effet juridique. Cela permettait à toute personne, quelle que soit sa religion, d’épouser qui elle voulait devant l’Office de l’état civil, sans se référer aux autorités religieuses.
  • Suppression des tribunaux religieux et attribution exclusive des juridictions à l’État. Il devenait ainsi possible de dissoudre le mariage par le divorce dans des circonstances prévues par la loi civile, et non par l’Église.
  • Garantie de la liberté religieuse, dont la liberté des parents de choisir la religion de leurs enfants et leur éducation religieuse dans les écoles, et ce jusqu’à l’âge de 16 ans. Par la suite, ce droit est transféré à l’enfant lui-même qui a le droit de changer de religion s’il le veut, ou de ne pas suivre d’éducation religieuse.
  • Placement des cimetières entre les mains des autorités civiles. Ainsi, tous les cimetières sont ouverts à tous, quelle que soit leur religion. On a supprimé la séparation entre catholiques et protestants après la mort, et les autorités religieuses n’avaient plus le droit de décider qui serait enterré dans un cimetière. Toute personne avait désormais droit à un enterrement décent, sans discrimination religieuse. On a estimé que sans cohabitation sous la terre, les humains ne peuvent pas cohabiter sur la terre.

Par ces mesures, les autorités suisses ont mis la main sur toutes les compétences civiles de l’Église de la naissance à la mort. Voilà les normes qui ont assuré la paix confessionnelle en Suisse au XIXe siècle, laquelle a permis la prospérité économique.

Or, les usages islamiques appliqués par la communauté musulmane, et dont certains sont admis par différents pays occidentaux, dont la France que nous prenons ici comme exemple, s’opposent aux normes que je viens de citer.  Ces usages conduisent à l’apartheid social et à la non-intégration des musulmans:

  • Les musulmans refusent le mariage d’une musulmane avec un non-musulman, alors qu’ils se permettent d’épouser les femmes non musulmanes. Si un chrétien en France veut épouser une musulmane, la communauté musulmane française lui impose la conversion à l’islam. S’il ne s’y plie pas, la femme musulmane et son mari non musulman risquent de se faire tuer par leur propre famille. Or sans mariages mixtes, aucune intégration sociale n’est possible pour la communauté musulmane. Et ces mariages doivent avoir lieu dans le respect des normes françaises, sans les discriminations spécifiquement musulmanes. Un musulman qui refuse que sa fille épouse un chrétien ne doit pas avoir le droit de séjourner en France, d’y demander l’asile politique ou d’en obtenir la nationalité.
  • Des imams en France célèbrent des mariages religieux à l’insu des autorités françaises, et certains de ces mariages sont polygames, en violation du droit français. Ces imams doivent être sanctionnés, déchus de leur nationalité et expulsés de la France.
  • La communauté musulmane en France ne reconnaît toujours pas la liberté de changer de religion. Les apostats, ceux qui quittent l’islam, doivent rester discrets par peur de se faire harceler, voire tuer en France. Aucun imam et aucun musulman ne doit être accepté en France s’il n’admet pas la liberté religieuse, y compris le droit de changer de religion, de quitter l’islam.
  • La communauté musulmane demande la création de cimetières ou de carrés réservés exclusivement aux musulmans, parce que le droit musulman interdit qu’on enterre un musulman à côté d’un mécréant. La France doit interdire la création de cimetières religieux, supprimer ceux qui existent et exiger que les morts soient enterrés les uns à côté des autres sans distinction de religion. Aucun imam et aucun musulman ne doit être accepté en France s’il n’admet pas ce principe d’égalité et de non-discrimination devant la mort.
  • La communauté musulmane place la loi religieuse au-dessus de la loi française. Il suffit d’observer les restrictions vestimentaires que la communauté musulmane impose à ses membres malgré l’interdiction du voile intégral en France. Un ressortissant musulman va jusqu’à payer les amendes infligées aux femmes qui portent le niqab en violation de la loi française. La France doit être ferme dans ce domaine et renvoyer les imams et les musulmans qui refusent de se plier aux normes françaises dans ce domaine.
  • La communauté musulmane cultive une vision de rejet par rapport aux non-musulmans dans leur propre culte. La prière de la Fatiha, premier chapitre du Coran, que chaque musulman doit répéter 17 fois dans les cinq prières quotidiennes, dit: « Dirige-nous vers le chemin droit. Le chemin de ceux que tu as gratifiés, contre lesquels tu n’es pas en colère et qui ne sont pas égarés ». Or, l’écrasante majorité des exégètes affirment, sans réfutation aucune, que ces deux catégories désignent respectivement les juifs et les chrétiens, comme je le démontre à travers l’examen de 88 exégèses anciennes et modernes, dans mon ouvrage intitulé La Fatiha et la culture de la haine. Et ceci est enseigné aussi aux enfants. Comment voulez-vous que des musulmans répétant 17 fois par jour de telles invocations haineuses à l’égard des non-musulmans puissent s’intégrer dans la société française? En outre, comment voulez-vous que des musulmans puissent s’intégrer parmi des gens que le Coran qualifie de mécréants (kafirs, terme constituant la pire insulte possible en langue arabe) et des juifs que le Coran dit transformés en porcs et en singes?

À ces problèmes juridiques et cultuels qui favorisent l’apartheid, j’ajouterai le jeûne du Ramadan, qui empêche toute activité normale et freine tout progrès économique pendant un mois, et affecte la santé des musulmans.

Ces normes islamiques doivent être combattues afin d’assurer l’intégration de la communauté musulmane en France. Il est du devoir des autorités français d’assurer la suprématie de la loi française sur le territoire de ce pays et de refuser l’octroi de l’asile politique, du permis de séjour et de la nationalité à ceux qui refusent de se plier aux lois françaises. Ces autorités doivent exiger des imams qui officient en France qu’ils prêtent un serment d’allégeance à la France, qu’ils se soumettre à ses lois et ne prônent pas les normes islamiques contraires à ces lois. Cela nécessite une profonde remise en question des enseignements islamiques qui contribuent à l’apartheid dans ce pays et menacent la paix religieuse entre les communautés. Ces imams doivent être formés en France, dans le respect des lois françaises, et non pas importés, avec leurs normes désuètes contraires aux lois françaises et aux conventions internationales signées par la France. 

Voilà donc la recette de la grand-mère suisse pour intégrer la communauté musulmane en France, au cas où les autorités françaises souhaitent vraiment son intégration. Mais cela nécessite une volonté politique et le courage de prendre des mesures efficaces et concrètes.

Sami Aldeeb, Dr en droit, professeur des universités
Directeur du Centre de droit arabe et musulman: https://www.sami-aldeeb.com  
Auteur d’une traduction française, une traduction anglaise et une traduction italienne du Coran (actuellement sous presse) par ordre chronologique, et d’autres ouvrages

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