Nous avons vu dans l’article précédent comment, à notre époque, des musulmans ont commencé à remettre en question la prohibition du vin, ou du moins à différencier les types de vin, interdisant de boire le vin produit de raisins, et permettant de boire l’alcool produit d’autres denrées, en se basant sur l’opinion de l’imam Abu Hanifa.
Dans ce dernier article consacré au vin, nous verrons si le prophète Mahomet et ses compagnons ont bu du vin.
Le prophète Mahomet et le vin
Dans les récits du prophète Mahomet sur le vin, nous trouvons différentes positions. Il y en a ceux qui condamnant la consommation du vin:
S’ils boivent du vin, fouettez-les, puis s’ils boivent, fouettez-les, puis s’ils boivent, fouettez-les, puis s’ils boivent, tuez-les.
Si un homme de ma nation boit du vin, Dieu n’acceptera de lui aucune prière durant quarante jours.
Toute boisson qui enivre est du vin, et toute boisson qui enivre est interdite. Quiconque boit du vin dans ce monde et meurt, ne la boira pas dans l’autre vie.
Ce dont beaucoup rend ivre, son peu est interdit.
La malédiction frappe le vin dans dix aspects: le vin en soi, celui qui le presse, qui charge autrui à le presser, celui qui le vend et celui qui l’achète, celui qui le porte et celui en faveur duquel il est porté, celui qui en reçoit le prix, celui qui le boit et celui qui le donne à boire.
Mais d’autre part Mahomet dit:
Si quelqu’un entre chez son frère musulman qui lui donne à manger, qu’il en mange sans poser des questions, et s’il lui donne à boire, qu’il en boive sans poser des questions.
Il y a des preuves que le prophète Mahomet a bu du vin avant et après sa prohibition
Le vin a joué un rôle important au début du message du prophète Mahomet: les sources islamiques indiquent que Khadija avait demandé que Mahomet l’épouse. Elle invita son père, lui donna à boire du vin jusqu’à l’ivresse, lui mit de beaux habits et immola une vache. Elle fit venir Mahomet et ses oncles pour demander la main de Khadija auprès de son père, et il acquiesça. Lorsqu’il est revenu à la raison, le père demanda ce qui se passait, et Khadija l’informa qu’il venait de la donner en mariage à Mahomet. Il protesta, affirmant que des notables de Quraysh avaient auparavant demandé sa main et il avait refusé de la leur donner.
Un récit rapporte qu’on faisait fermenter une boisson dans un ustensile ou un pot en pierre dont Mahomet se servait pour boire et faire ses ablutions.
On offrait chaque année au Messager d’Allah une jarre de vin. Lorsque le vin a été interdit, on lui amena une jarre; il la regarda, rit et demanda s’ils savaient que le vin a été interdit. On lui demanda: O Messager d’Allah, ne le vendons-nous pas pour profiter de son prix? Le Messager d’Allah dit: Dieu a maudit les Juifs. Il leur a interdit la graisse des bovins et des ovins, et ils la fondaient pour la vendre. Le prix du vin et sa vente sont illicites.
Ibn Al-Qushayri demanda à Aïcha sur le vin, elle lui appela une esclave abyssinienne et lui dit de lui poser la question puisqu’elle fermentait une boisson pour le Messager de Dieu. L’esclave expliqua qu’elle fermentait la boisson pendant la nuit et l’accrochait, et Mahomet en buvait.
Un homme demanda à Ibn Abbas pourquoi les gens de sa maison donnaient à boire du vin, alors que leurs cousins servaient du lait et du miel: est-ce par avarice ou pour une autre raison? Ibn Abbas répondit que ce n’était pas par avarice ou pour une autre raison, mais parce que le Messager Dieu était venu avec Ussama Ibn-Zayd sur un chameau, et il demanda à boire. On lui apporta du vin, dont il a bu et en donna le reste à Ussama Ibn-Zayd, qui en a bu à son tour. Le Messager de Dieu dit alors qu’on avait bien fait. Et ainsi nous ne voulons pas changer ce que le Messager de Dieu a dit.
Selon Ibn-Abbas, on fermentait pour Mahomet le raisin sec durant la nuit, et ensuite il le versait dans un ustensile dont il buvait le lendemain et le jour d’après. Le troisième jour il le donnait à boire ou le buvait, et le reste il le jetait.
Selon Anas: Um-Salim avait une coupe en bois, dont elle abreuvait le Messager de Dieu toute sorte de boisson: eau, miel, lait et vin.
Jabir bin Abdullah dit: Nous étions avec le Messager d’Allah qui demanda à boire. Un homme lui dit: O Messager de Dieu, te servons-nous du vin, il répondit: «Oui». L’ homme sortit chercher du vin, et il en a bu.
Selon Abd-Allah Ibn Mas’ud, le Messager d’Allah lui demanda s’il avait de l’eau pour faire ses ablutions. Il lui répondit qu’il n’avait que du vin. Mahomet dit: « Un bon fruit et une eau pure », et il s’en est servi pour ses ablutions.
Selon Abd-Allah Ibn Mas’ud, le Prophète a bu du vin lors de son dernier pèlerinage à La Mecque en se servant de l’ustensile d’Al-Abbas. Il l’a trouvé très fort et a froncé. Il demanda de lui amener un seau d’eau du puits de Zamzam pour le verser sur le vin et dit: il faut le couper ainsi avec l’eau. Ce faisant, Mahomet a abrogé l’interdiction de boire du vin. Si c’était interdit, il l’aurait jeté au lieu d’y verser de l’eau et de le boire.
Ikrima rapporte d’Ibn Abbas: « Le Prophète passait autour de la pierre noire, et à chaque fois il la touchait avec son bâton. Ensuite, il descendit du chameau et fit deux génuflexions. Il vint chez les serveurs de boisson et demanda de lui en servir. Abbas lui demanda: Ne veux-tu pas qu’on te donne à boire de ce que nous faisons dans nos maisons. Il dit: « Non, mais donnez-moi à boire de ce que les gens boivent ». On lui apporta un verre de vin, il le goûta et fronça: « Versez-y de l’eau » qu’il répéta une, deux ou trois fois. Puis il dit: « Si c’est ainsi qu’on vous le sert, faites-le comme ça. »
Selon Saïd Ibn Mas’ud Al-Ansari: Le prophète a eu soif en tournant autour de la Kaaba. On lui apporta du vin, le sentit et fronça. Il demanda alors de lui amener de l’eau qu’il versa dans le vin et en but.
Les compagnons de Mahomet et le vin
Les exégèses et autres sources islamiques indiquent que les compagnons de Mahomet ont bu du vin avant et après la prohibition.
Abd-Allah Ibn-Abbas dit: Si l’un de vous boit neuf verres sans s’enivrer, la boisson est licite, mais s’il s’enivre avec le dixième verre, elle est illicite.
Le secrétaire d’Akba Ibn-Amer dit: nos voisins buvaient du vin et je leur ai intimé l’ordre de cesser, mais ils n’ont pas voulu. J’ai dit à Akba Ibn-Amer: Les voisins boivent du vin et je leur ai intimé l’ordre de cesser, mais ils n’ont pas voulu, je vais appeler la police. Il m’a répondu: Oh toi, laisse-les tranquilles, car j’ai entendu le Messager d’Allah qui disait: celui qui voit le défaut d’autrui et le cache, c’est comme celui qui sauve une fille qui allait être enterrée vivante.
Hassan bin Mukhaariq dit qu’un homme voyageait à jeun avec Omar Ibn Al-Khattab. Lorsqu’il a rompu son jeûne, il s’est précipité sur une gourde qui contenait du vin, en a bu et s’est enivré. Omar lui a administré des coups de fouet, mais il protesta: je n’ai fait que boire de ta gourde. Omar lui répondit: je t’ai fouetté parce que tu t’es enivré.
On amena un homme à Ibn Mas’ud et on lui dit: « La barbe de cet homme dégouline de vin ». Ibn Mas’ud répondit: Nous avons été interdits d’espionner, mais si on le prend en flagrant délit, on le sanctionne. »
Omar est venu chez des gens qui lui apportèrent du vin doux. Il dit: n’avez-vous pas plus que cela? Ils dirent: Mais si, mais nous nous gênions à te l’apporter. Lorsqu’on lui apporta le vin, il y ajouta de l’eau, but à satiété, et le donna à celui qui se trouvait à sa droite.
Saad Ibn Abu-Waqas a préparé à manger et a invité des compagnons du prophète, y compris un homme des Ansar. Il leur grilla une tête de chameau et le leur offrit. Lorsqu’ils ont bu du vin et se sont enivrés, ils se sont mis à discuter. Sa’id dit quelque chose qui déplut à l’homme des Ansar, lequel prit la machoire du chameau et cassa le nez de Sa’d. C’est alors que les versets interdisant le vin ont été révélés.
Ali Ibn Abu Talib dit qu’Abdul-Rahman Ibn-Awf nous a invités à un repas et nous a donné à boire du vin. Lorsque le temps de la prière est arrivé, je l’ai présidée et j’ai récité de travers le chapitre 109: Dis: «Ô vous les mécréants! Je n’adore pas ce que vous adorez. Et nous adorons ce que vous adorez » (au lieu de: Ni vous, vous êtes adorateurs de ce que j’adore). C’est alors que le verset 4.43 « Ô vous qui avez cru! N’approchez pas la prière ivres que lorsque vous savez ce que vous dites » a été révélé.
Conclusion
À la fin de mes articles sur le vin, nous pouvons dire qu’il y a trois courants en rapport avec le vin: le courant de la modération qui permet de boire sans arriver à l’ivresse, le courant de la prohibition totale, et le courant de l’ivresse et de la dépendance. Quiconque veut en savoir plus sur le courant de l’ivresse et de la dépendance, peut revenir à deux ouvrages en arabe que je vous conseille de télécharger:
Suleiman Hritani: Le vin et le phénomène de la multiplication des bars et des réunions de boissons dans la société islamique https://www.dopdfwn.com/cacnoscana/scanoanya/kutubpdfcafe-DF6MK.pdf
Ali al-Maqri: Le vin et l’alcool en Islam http://www.bookleaks.com/files/fhrst5/250.pdf
Nous pensons que l’interdiction du vin a créé des problèmes aux musulmans. Tout ce qui est interdit est convoité. Cela n’a pas aidé à éduquer l’individu pour qu’il contrôle ses penchants. Un ami néerlandais m’a dit que les princes d’Arabie Saoudite avaient des bouteilles de whisky remplies ou vides. S’ils ouvrent la bouteille, ils n’arrêtent pas de boire jusqu’à ce qu’ils la finissent. Les sources arabes regorgent d’histoires sur les califes qui ont violé la prohibition du vin, et en ont abusé, tandis qu’ils sanctionnaient ceux qui tombaient entre leurs mains. Il aurait été préférable que l’Islam autorise le vin, mais interdise l’ivresse et la dépendance, comme l’ont fait le judaïsme et le christianisme avant lui.
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