Dans la vidéo précédente, nous avons vu les versets qui parlent du vin sur Terre et son interdiction en trois étapes, bien qu’auparavant il ait été considéré comme un signe de Dieu:
M-70/16:67. Des fruits des palmiers et des raisins, vous obtenez une boisson enivrante, et une bonne attribution. ~ Il y a là un signe pour des gens qui raisonnent.
Même après avoir été interdit, il y a des gens qui en buvaient en vertu du verset
H-112/5:93. Nul grief sur ceux qui ont cru et ont fait les bonnes œuvres pour ce dont ils se sont nourris, s’ils ont craint, ont cru, et ont fait les bonnes œuvres, puis ils ont craint et ont cru, puis ils ont craint et ont fait du bien. ~ Dieu aime les bienfaisants
Al-Suyuti dit dans son exégèse Durr al-Manthur:
Du vivant de Mahomet, les buveurs ont été battus avec les mains, les souliers et les bâtons. Abu Bakr leur a administré quarante coups de fouets. Après sa mort, Omar fit de même. Et un jour on lui amena un buveur de parmi les premiers immigrants, et il ordonna de le fouetter mais le buveur s’y opposa: « Pourquoi veux-tu me fouetter? Remettons-nous au livre de Dieu ». Omar lui demanda quel livre de Dieu l’empêcherait de le fouetter? Le buveur lui récita alors le verset: Nul grief sur ceux qui ont cru et ont fait les bonnes œuvres pour ce dont ils se sont nourris, s’ils ont craint, ont cru, et ont fait les bonnes œuvres, puis ils ont craint et ont cru, puis ils ont craint et ont fait du bien. ~ Dieu aime les bienfaisants. Or, ajouta le buveur, j’ai participé à quatre batailles avec Mahomet et je fais partie des bienfaisants. Omar demanda aux compagnons de lui répondre. Ibn Abbas dit: Ce verset constituait une excuse pour le passé en faveur des buveurs morts avant l’interdiction du vin, et un argument à l’encontre des autres après l’interdiction. Omar demanda: Que faire? Ali déclara: Nous voyons que s’il a bu il s’est enivré, et s’il s’est enivré il a déliré, et s’il a déliré, il a calomnié. Et la sanction de la calomnie est de quatre-vingts coups de fouet. Omar a commandé alors de lui administrer quatre-vingts coups de fouet.
À notre époque, certains ont commencé à remettre en question la prohibition du vin, ou du moins à différencier les types de vin.
Nous commençons par ceux qui remettent en question la prohibition du vin. Cette tendance est adoptée par des Coranistes tunisiens, en particulier le regretté professeur tunisien Mohamed Talbi
L’Association internationale des musulmans coranistes a déclaré que les versets coraniques, les hadiths et les exégèses n’interdisaient pas la consommation de vin, soulignant que Dieu dit dans le verset M-70/16:67: Des fruits des palmiers et des raisins, vous obtenez une boisson enivrante, et une bonne attribution. ~ Il y a là un signe pour des gens qui raisonnent. Dans le verset H-92/4:43, il dit: Ô vous qui avez cru! N’approchez pas la prière ivres que lorsque vous savez ce que vous dites. Dans le verset H-87/2:219, il dit: Ils te demandent sur le vin et le jeu de hasard. Dis: «Dans les deux il y a un grand péché et des profits pour les humains, mais leur péché est plus grand que leur profit». Dans le verset H-112/5:90, il dit: Ô vous qui avez cru! Le vin, le jeu de hasard, les pierres dressées, et les flèches divinatoires sont un opprobre, de l’œuvre du Satan. Écartez-vous-en donc. Dans le verset H-112/5:91, il dit: Le Satan veut seulement lancer parmi vous l’inimitié et la haine, par le vin et le jeu de hasard, et vous rebuter du rappel de Dieu et de la prière. N’allez-vous pas donc vous [en] abstenir? Il n’y a dans ces versets aucune interdiction explicite comme il le fait par exemple le verset M-70/16:115: Il vous a interdit la charogne, le sang, la chair de porc, et ce qui a été offert à un autre que Dieu. L’Association en conclut que la consommation du vin n’est pas interdite. Et si le Coran parle de l’œuvre du Satan, ce n’est pas du vin en soi, mais de son effet néfaste sur la santé humaine et la société. Il vaut mieux donc s’en abstenir. C’est la raison pour laquelle le vin est décrit à juste titre comme la «mère des vices».
Le Tunisien Farhat Othman a écrit un article intitulé « L’Islam n’interdit pas le vin, mais l’ivresse ». Il dit:
L’interdiction explicite du vin ne figure ni dans le Coran ni dans la Sunna, mais chez les juristes musulmans. Il s’agissait d’une position imposée par les exigences de leur époque du fait que la consommation du vin avait de nombreux désavantages sociaux. Nous savons pourquoi le verset H-92/4:43 a été révélé: « Ô vous qui avez cru! N’approchez pas la prière ivres que lorsque vous savez ce que vous dites ». Cela est dû au fait que des ivrognes participaient à la prière. Et le vin, tant qu’il ne provoque pas l’ivresse, n’est pas interdit dans l’islam. Ceux qui ne peuvent pas se retenir doivent s’en abstenir. Ceci est imposé par la raison et les bonnes manières, y compris pour la consommation en général et de la consommation du vin en particulier. C’est ce qui fait que le Coran déclare explicitement que l’ivresse est interdite dans la prière. Une telle logique n’est-elle pas meilleure pour réduire le phénomène de l’ivresse dans notre société, en plus d’être impartiale dans notre compréhension de la religion au lieu de prévenir le vin, ce qui incite inévitablement à boire jusqu’à l’ivresse? ….
Ainsi, la question du vin chez nos juristes est passée de la modération dans la consommation de ce qui est bénéfique – à l’interdiction totale du vin estimant que le croyant inévitablement s’enivrera. Ainsi le croyant est considéré comme un mineur incapable de se retenir, ne sachant pas mettre des limites à sa consommation du vin.
Le cheikh égyptien Mustafa Rashid a adopté la même position dans un article intitulé « Le vin est répugnant mais l’interdiction concerne l’ivresse ». Il examine les versets du Coran et les récits de Mahomet relatifs au vin et en conclut que l’unique interdiction concerne l’ivresse dans la prière, en vertu du verset H-92/4:43. Ô vous qui avez cru! N’approchez pas la prière ivres que lorsque vous savez ce que vous dites. Rien n’empêche donc de boire du vin avant la prière, mais on ne doit pas se rendre à la prière en étant ivre. Et il insiste sur le fait que le Coran ne fait pas usage du terme interdire en parlant du vin, comme il le fait dans le verset M-70/16:115: Il vous a interdit la charogne, le sang, la chair de porc, et ce qui a été offert à un autre que Dieu. Pour lui donc, la consommation du vin ne peut pas être considérée comme interdite, en vertu du verset M-70/16:116: Ne dites pas, conformément aux mensonges proférés par vos langues: «Ceci est permis, et ceci est interdit», pour fabuler sur Dieu le mensonge. Ceux qui fabulent sur Dieu le mensonge ne réussissent pas.
Comme on pouvait se l’attendre, des milieux religieux ont rejeté la position susmentionnée. Et le rejet est venu d’un courant coraniste dirigé par le professeur égyptien Ahmed Sobhi Mansour. Celui-ci estime que le Coran utilise les verbes « interdire », « s’abstenir » et « ne pas approcher » pour rendre illicite un acte donné. Ainsi, parlant de l’adultère, le Coran dit dans le verset H-50/17:32: N’approchez pas la fornication. C’est une turpitude et mauvaise voie. Et il en est de même du vin dans les deux versets:
H-112/5:90. Ô vous qui avez cru! Le vin, le jeu de hasard, les pierres dressées, et les flèches divinatoires sont un opprobre, de l’œuvre du Satan. Écartez-vous-en donc. ~ Peut-être réussirez-vous!
H-112/5:91. Le Satan veut seulement lancer parmi vous l’inimitié et la haine, par le vin et le jeu de hasard, et vous rebuter du rappel de Dieu et de la prière. N’allez-vous pas donc vous [en] abstenir?
Il estime que les verbes « s’abstenir » et « ne pas approcher » sont bien plus fort que le verbe interdire. Quant au verset M-70/16:67: Des fruits des palmiers et des raisins, vous obtenez une boisson enivrante, et une bonne attribution. ~ Il y a là un signe pour des gens qui raisonnent, il estime que le terme arabe « sakar » devrait être compris dans le sens de sucre et non pas de boisson enivrante. Il est inconcevable qu’Allah dans ce verset loue une boisson enivrante, et ensuite il parle d’œuvre de Satan dans le verset H-112/5:90.
Il y a ceux qui ont essayé de différencier les types de vin. Le professeur Saad Eddin Al-Hilali, professeur de droit musulman comparé à l’Université Al-Azhar, dit que les juristes ont divergé en matière d’interdiction du vin. Ainsi l’Imam Abu-Hanifa, juriste éminent, distingue entre le vin produit du raisin, et l’alcool produit d’autres denrées. La consommation du vin produit du raisin est totalement interdite, qu’il y ait ivresse ou pas. Par contre la consommation de l’alcool produit d’autres denrées, est licite, l’interdiction n’intervenant qu’en cas d’ivresse. Par conséquent, boire de la bière produite d’orge est licite tant qu’on n’arrive pas à l’ivresse. Ceci est enseigné dans l’Université de l’Azhar, et le problème est que les gens ne lisent pas les écrits de l’École d’Abu-Hanifa. Le professeur en question permet de faire usage du vin ou de produit pharmaceutique contenant de l’alcool en tant que médicaments s’il n’existe pas d’autres moyens pour guérir une maladie. Il cite aussi Abu-Hanifa pour qui celui qui transporte le vin ne commet pas d’acte illicite, contrairement à un récit attribué à Mahomet. Le transporteur n’est qu’un employé, et l’employé n’est pas tenu d’investiguer ce qu’il transporte. Ceux qui rendent illicite le transport du vin visent en fait à détruire le tourisme en Égypte.
Dans le prochain article, nous verrons si le prophète Mahomet et ses compagnons ont bu du vin ou non. C’est la suite logique de ce que nous avons dit dans l’article sur le vin dans le christianisme, dans lequel nous avons vu que Jésus avait consommé du vin.
Comments are closed.