Dans le premier épisode, nous avons parlé du concept de la liberté religieuse, qui signifie la non-discrimination entre les personnes sur la base de leur appartenance religieuse, et comment la Déclaration d’indépendance de l’État d’Israël est en fait une déclaration de création d’un Etat juif en terre d’Israël. Ce qui est contraire au principe de la liberté religieuse.
Cela a été confirmé par la loi Israël étant la Nation-Etat du Peuple Juif, dont nous allons parler dans ce deuxième épisode.
Je répète ici que la notion de nazisme juif n’est pas de moi. Elle est empruntée au philosophe israélien Yeshayahu Leibowitz, Professeur de l’Université hébraïque de Jérusalem, décédé en 1994, opposant de la politique d’Israël, qu’il décrit comme étant un régime judéo-nazi.
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Le texte de la loi
On trouvera ci-après le texte de la loi Israël étant la Nation-Etat du Peuple Juif, qui définit Israël comme la patrie historique du peuple juif, adopté par la Knesset le 19 juillet 2018.
Cette loi est une loi nazie.
Loi Fondamentale : Israël étant l’Etat-Nation du Peuple Juif
1. Principes fondamentaux
A. La Terre d’Israël est la patrie historique du peuple juif, dans laquelle l’État d’Israël a été créé.
B. L’État d’Israël est le foyer national du peuple juif, dans lequel il réalise son droit naturel, culturel, religieux et historique à l’autodétermination.
C. Le droit d’exercer l’autodétermination nationale dans l’État d’Israël est propre au peuple juif.
2 . Les symboles de l’État
A. Le nom de l’État est « Israël ».
B. Le drapeau de l’État est blanc avec deux bandes bleues près des bords et une Étoile de David bleue au centre.
C. L’emblème de l’État est une menorah à sept branches avec des feuilles d’olivier des deux côtés et le mot « Israël » au-dessous de celle-ci.
D. L’hymne de l’État est « Hatikvah ».
E. Les détails relatifs aux symboles de l’État seront fixés par la loi.
3 . La capitale de l’État
Jérusalem, entière et unifiée, est la capitale d’Israël.
4. Langue
A. La langue de l’État est l’hébreu.
B. La langue arabe a un statut spécial dans l’État ; la réglementation de l’usage de l’arabe dans et par les institutions de l’État sera fixée par la loi.
C. Cette disposition ne porte pas atteinte au statut accordé à la langue arabe avant que cette loi n’entre en application.
5. Retour des exilés
L’État sera ouvert à l’immigration juive et au retour des exilés.
6 . Lien avec le peuple juif
A. L’État s‘efforcera d’assurer la sécurité des membres du peuple juif en difficulté ou en captivité en raison de leur Judéité ou de leur citoyenneté.
B. L’État agira dans la Diaspora pour renforcer l’affinité entre l’État et les membres du peuple juif.
C. L’État agira pour préserver le patrimoine culturel, historique et religieux du peuple juif parmi les Juifs de la Diaspora.
7. Colonies juives
L’État considère le développement des colonies juives comme une valeur nationale et agira pour encourager et promouvoir leur création et leur renforcement.
8. Calendrier officiel
Le calendrier hébreu est le calendrier officiel de l’État et en même temps que celui-ci le calendrier grégorien sera utilisé comme calendrier officiel. L’usage du calendrier hébreu et du calendrier grégorien sera fixé par la loi.
9. Journée de l’Indépendance et journées commémoratives
A. La Journée de l’Indépendance est la fête nationale de l’État.
B. La Journée commémorative pour ceux qui sont morts dans les Guerres d’Israël et dans l’Holocauste et la Journée du Souvenir de l’Héroïsme sont les fêtes commémoratives de l’État.
10 . Journées de Repos et Sabbat
Le Sabbat et les fêtes d’Israël sont les jours de repos instaurés dans l’État ; les Non-Juifs ont droit à maintenir les jours de repos lors de leurs Sabbats et fêtes ; les détails de cette question seront fixés par la loi.
11. Immuabilité
Cette Loi Fondamentale ne peut pas être modifiée, sauf par une autre Loi Fondamentale adoptée par les députés.
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Le Patriarcat latin a publié une déclaration sur la nouvelle loi sur Israël, Etat-nation
La loi fondamentale « Israël, l’Etat-nation du peuple juif » récemment promulguée est source de grande inquiétude. Alors qu’elle semble avoir été promulguée pour des raisons de politique intérieure, la loi définit Israël comme l’Etat-nation du peuple juif mais néglige de garantir constitutionnellement les droits des populations locales et des autres minorités qui vivent dans le pays. Les Palestiniens citoyens d’Israël, représentant 20% de la population, sont exclus de cette déclaration de manière flagrante.
Il est inconcevable qu’une loi à valeur constitutionnelle ignore sciemment un segment entier de la population comme si ces membres n’avaient jamais existé. Si cette loi n’a peut-être pas d’incidences concrètes, elle envoie pourtant un signal sans équivoque aux Palestiniens citoyens d’Israël, à savoir qu’ils ne seraient pas chez eux dans ce pays. La langue arabe a été rétrogradée, passant de langue officielle à langue dotée d’un « statut spécial », et en outre, a été précisé l’engagement à œuvrer au développement de colonies juives dans le pays, sans mentionner aucunement le développement du pays pour le reste de ses habitants.
La loi fondamentale est plutôt exclusive qu’inclusive, controversée que consensuelle, politisée davantage qu’enracinée dans les lois fondamentales, communes et acceptables par toutes les fractions de la population.
Cette loi discriminatoire viole ouvertement la résolution 181 de l’Assemblée générale des Nations unies ainsi que la propre déclaration d’indépendance d’Israël. La première garantissait l’établissement d’un Etat juif tout en assurant l’intégralité des droits civiques aux Arabes vivant en son sein. Dans la seconde, les fondateurs de l’Etat se sont engagés clairement et sans équivoque à favoriser son développement pour le bien de tous ses habitants et à garantir à tous une égalité complète de droits politiques et sociaux, sans discrimination de sexe, d’origine ou de religion.
Enfin, cette loi transgresse et contredit la loi fondamentale « Liberté et dignité de l’Homme » promulguée en 1995 qui promet le respect de la dignité de chaque personne. Là où il y a discrimination, il n’y a pas de dignité.
Autrement dit, la loi affirme qu’il n’y pas d’égalité des droits entre Juifs et Arabes et refuse de reconnaître même l’existence de ces derniers.
Il ne suffit pas d’accorder et de garantir les droits individuels. Tout Etat comportant en son sein de grandes minorités a le devoir de reconnaître leurs droits collectifs et de permettre la préservation de leur identité collective, incluant leurs traditions religieuses, ethniques et sociales.
Les citoyens chrétiens d’Israël partagent les mêmes inquiétudes, tout comme toute communauté non-juive en ce qui concerne cette loi. Ils appellent tous les citoyens de l’Etat d’Israël qui croient encore au concept fondamental d’égalité entre tous les citoyens de la même nation à exprimer leur opposition à cette loi et à avertir des dangers qui en émanent pour le futur de ce pays.
Patriarcat latin de Jérusalem
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Mais il y a encore plus grave. Cette loi israélienne ignore complètement le fait qu’Israël a détruit 81% des villages palestiniens et chassé leurs habitants pour le seul crime qu’ils ne sont pas juifs. Alors que les Juifs de Russie, de Pologne, de France et de Honolulu sont autorisés à venir en Palestine, les Palestiniens chassés par Israël se voient refuser le droit de retourner sur leurs terres et dans leurs villages. Ceci fait de la loi en question une vraie loi nazie.
Voir la liste des villages détruits par Israël – 81% des villages de Palestine – et déplacés par ce lien https://goo.gl/7kfiWK
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Dans le prochain article, nous parlerons de la destruction de villages palestiniens et de l’expulsion de leurs habitants.
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Sami Aldeeb, dr en droit
Directeur du Centre de droit arabe et islamique https://www.sami-aldeeb.com
Mes ouvrages: https://sami-aldeeb.com/livres-books
Liste des localités palestiniennes détruites par Israël et dont les habitants ont été chassés pour le seul crime qu’ils ne sont pas juifs: https://goo.gl/7kfiWK
Discriminations contre les non-juifs en Israël: https://goo.gl/cDZ2Z4
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