Sami Aldeeb: Est-il possible de réformer l’islam et comment le faire?

Je me permets de vous donner ici la traduction française d’un article paru dans un forum arabe très consulté (un million de visites par jour) intituléAl-Hiwar al-mutamaddin.

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En réponse à mon article en arabe: L’Occident est occupé par les islamistes et il en est le collaborateur  http://www.ahewar.org/debat/show.art.asp?aid=350717, Monsieur Yusri Al-Badri m’a demandé:

Professeur Sami …. Vos propos sont vrais dans une large mesure. Mais pourquoi êtes-vous fondamentalement contre l’idée de la religion? N’est-il pas possible de considérer l’islam comme les autres religions célestes, à savoir le judaïsme et le christianisme? C’est-à-dire un message céleste que les humains ont changé au cours des siècles et nécessitant seulement d’être réformé?

Voici ma réponse:

Cher Monsieur Yusri Al-Badri:

Votre demande est légitime et vous avez le droit à une réponse. Je vais donc reprendre votre message point par point

Vous dites: Vos propos sont vrais dans une large mesure.

Sami: Belles paroles et introduction rassurante. Ceci signifie que ce que je raconte n’est pas tout faux. Il y a donc des points de convergence entre nous.

Vous dites: Mais pourquoi êtes-vous fondamentalement contre l’idée de la religion?

Sami: Je ne sais pas comment vous êtes parvenu à cette conclusion. Je suis une personne religieuse. Je voulais dans ma jeunesse devenir un prêtre catholique, et j’ai effectivement étudié dans le Séminaire à Beit-Jala en Palestine pendant quatre ans à cette fin. Mais les pères responsables de l’école ont décidé de me renvoyer  pour des raisons que je ne connais pas. Tout ce que je sais est qu’ils m’ont donné une lettre au curé de mon village lorsque je suis parti pour passer mes vacances annuelles chez mes parents. J’ai ouvert la lettre et j’y ai lu ce qui suit: «Ce garçon n’est pas normal, gardez-le au village». Mais dans tous les cas, je me considère comme un fervent chrétien, à ma manière. J’ai expliqué ma pensée religieuse dans plusieurs articles en arabe dans ce forum et vous pouvez vous y référer. Voir, par exemple, http://www.ahewar.org/debat/show.art.asp?aid=328279. Et je ne vous cache pas que je suis en train de créer une nouvelle religion dont vous pouvez lire les principaux points dans cet article en français: “Une nouvelle religion et un nouveau livre saint”: https://blog.sami-aldeeb.com/?p=31631

Vous dites: N’est-il pas possible de considérer l’islam comme les autres religions célestes, à savoir le judaïsme et le christianisme?

Sami: Permettez-moi de m’arrêter ici sur le terme «religion céleste». Il n’existe pas de religion céleste ou livre céleste. Chaque religion et chaque livre saint est un produit humain. Et les prophètes eux-mêmes sont des êtres humains comme vous et moi. Dans toutes les religions, dans tous les livres saints, et chez tous les prophètes vous pouvez trouver du bien et du mauvais, comme c’est le cas dans tout ce qui est humain. Et je pense que vous seriez d’accord avec moi sur ce point, comme semble l’indiquer la dernière phrase de votre message à laquelle je répondrai dans le point suivant.

Vous dites, en expliquant: les autres religions ont été changées au cours des siècles et cela s’applique à l’islam qui nécessite seulement d’être réformé.

Sami: Vous reconnaissez donc que les autres religions (célestes) ont été changées au cours des siècles et que l’islam nécessite d’être réformé. Il y a donc des défauts dans l’islam comme dans les autres religions. Quels sont ces défauts? Comment peut-on les réformer? Vous n’avez pas indiqué quels sont ces défauts, ni comment les autres religions ont été réformées, peut-être parce que vous estimez que je connais la réponse à ces deux points. Je vais donc essayer d’exposer ce que je connais, en vous priant de me corriger afin d’enrichir le dialogue pour notre profit mutuel.

Défauts des autres religions, dont l’islam

Chaque religion comporte des légendes contraires à la raison (de telles légendes se trouvent dans toutes les cultures tant primitives que développées, tant anciennes que modernes). Elle comporte également des normes sociales visant à régler la relation avec Dieu ou d’autres forces extérieures (appelez-les comme vous voulez) et la relation entre les êtres humains. Ces normes ont des éléments positifs (tels que la prévention du désordre et le maintien de la paix sociale) et des défauts (comme l’oppression des plus faibles par les plus forts). Je vous donne ici des exemples de défauts espérant de pouvoir nous y entendre:

– Oppression des enfants: il en dérive le crime de la circoncision dont sont victimes annuellement des millions d’enfants innocents, ainsi que des mariages précoces de fillettes. Pour votre connaissance, chaque semaine deux filles meurent au Yémen en raison de ce genre de mariage pratiqué par le Prophète de l’islam avec Aïcha à l’âge de six ans.

– L’oppression des femmes: il en dérive la polygamie, les mutilations génitales féminines, la transformation des femmes en sacs de poupelles et leur excluson de l’éducation et des fonctions religieuses et publiques

– L’oppression des adeptes d’une religion autre que celle du conquérant: d’où la destruction des statues des dieux, l’imposition de tribut, l’autorisation faite à un musulman d’épouser une femme non-musulmane tout en empêchant les non-musulmans d’épouser une musulmane, et le déni de la liberté de croyance et d’expression. De ceci dérive le délit d’apostasie puni de mort, sanction prévue par le code pénal arabe adopté en 1996 par le Conseil des ministres arabes de la Justice. Voir ce code ici http://www.carjj.org/node/237

– Les châtiments cruels: vous connaissez sans doute ce que les humains ont inventé comme sanctions. En ce qui concerne l’Islam, il y a l’amputation de la main du voleur, la lapidation en cas d’adultère, et la loi du talion (œil pour œil et testicule pour testicule), sanctions prévues par le code susmentionné du Conseil des ministres arabes de la Justice.

– L’oppression de la libre pensée et de l’usage de la raison: d’où la persécution des intellectuels et la destruction de leurs livres, et la persécution des artistes et des poètes. Auparavant, les livres d’Averroès ont été brûlés, et récemment le Qatar a emprisonné un poète à cause d’un poème, et l’Arabie saoudite a emprisonné un penseur à cause de ses tweets.

– Oppression des vaincus: en plus de ce qui précède, il en dérive l’esclavage, la capture de femmes et les marchés aux esclaves. Après l’occupation de la Tunisie des milliers d’enfants ont été enlevés à leurs parents et vendus comme esclaves sur les marchés de Damas capitale du califat des Omeyyades.

Ces défauts qui existaient dans toutes les religions à des degrés divers ont été modifiés ou sont en voie de modification. Ceci est requis de l’islam ou a été modifié par lui. Ainsi l’esclavage a été aboli et la plupart des pays islamiques ne lapident plus … mais il y a encore des gens qui veulent y revenir …. comme le Conseil des ministres arabes de la Justice.

Difficulté de réformer l’islam

Si nous voudrions réformer les défauts de l’islam, nous devrions renverser toutes les normes islamiques. Et vous connaissez les difficultés qu’ont les pays arabes et islamiques à surmonter ces défauts. La raison de ces difficultés est la croyance que ces normes proviennent de Dieu (inscrites dans le Coran et la Sunnah – tradition de Mahomet) et qu’elles sont supérieures aux normes humaines … il n’est donc pas nécessaire de les modifier. Ils nient l’existence de défauts, et voudraient même revenir sur ce qui a été modifié. Il y a ceux qui réclament le retour au système de l’esclavage, la capture de femmes, l’imposition de tribut contre les non-musulmans et la démolition des Pyramides et du Sphinx comme ce fut le cas avec les statues de Bouddha en Afghanistan, la statue d’Abou Ala Marri en Syrie, et la statue de Taha Hussein en Egypte. Et il y a ceux qui veulent restaurer la lapidation, la peine de mort contre l’apostat et l’amputation des mains des voleurs – comme il en ressort du code pénal arabe adopté par le Conseil des ministres arabes de la Justice.

Si nous voudrions changer les défauts de l’islam, nous devrions donc aborder les raisons qui empêchent de modifier ces défauts: à savoir l’idée que le Coran est paroles de Dieu, l’idée que le Prophète Mahomet est infaillible, et l’idée qu’il faut suivre ce qui figure dans le Coran et la Sunnah et l’imposer aux autres. Nous devons donc considérer le Coran non pas comme paroles de Dieu, mais comme paroles de l’homme (comme les Mille et Une Nuits), et que le prophète Mahomet et ses compagnons comme de simples êtres humains (comme Ali Baba et les quarante voleurs).

C’est l’objectif que nous devons nous efforcer d’atteindre. Mais comment y parvenir? Il y a ceux qui veulent ruser: ils divisent le Coran entre mecquois et médinois, acceptant le Coran mecquois (sans normes juridiques) et rejetant le Coran médinois  (c’était la position du soudanais Mahmoud Muhammad Taha). Il y a ceux qui acceptent le Coran mais rejettent la Sunnah (c’est la position des coranistes dont Gamal Al-Banna, Rashad Khalifa, Ahmad Sobhi Mansour et autres). Et il y a ceux qui veulent placer les normes coraniques dans leur contexte historique, ce qui signifie qu’elles ne sont pas applicables à notre époque (c’est la position de nombreux libéraux musulmans).

Mais le courant sunnite et chiite officiel dominant tel qu’enseigné dans les programmes scolaires de la maternelle à l’université et promu dans les mosquées et par les radios et les télévisions rejette ces théories, estimant qu’elles sapent l’islam. Ce courant officiel préconise la mise à mort des adeptes de ces théories. Rappelons ici ce qu’écrit Mohammad Mitwalli Al-Sharawi: «Si j’étais le responsable de ce pays ou la personne chargée d’appliquer la loi de Dieu, je donnerais un délai d’une année à celui qui rejette l’islam, lui accordant le droit de dire qu’il n’est plus musulman. Alors je le dispenserais de l’application du droit musulman en le condamnant à mort en tant qu’apostat».

La voie de la franchise

Je ne suis pas contre ceux qui cherchent à ruser, et je leur souhaite longue vie, à condition de ne pas oublier l’objectif pour lequel ils travaillent, et que la durée pour y parvenir ne soit pas trop longue. Mais personnellement, je préfère parler franchement. Comme le dit l’expression arabe: “L’aisance est dans la franchise”.  Je dis franchement que le Coran n’est pas paroles de Dieu, mais écrit par un rabbin étourdi, et le prophète Mahomet est un homme comme vous et moi, et il est même un criminel de guerre qui doit être condamné. Il n’existe pas de sharia divine, tout cela est un non-sens, et Dieu en est quitte.

Je veux ici ajouter que je ne suis pas contre les légendes religieuses et les actes de culte. Vous êtes libres de prier, de jeûner et de faire le pèlerinage à condition de ne pas déranger les autres comme le font certains ou la plupart des musulmans. Pour votre connaissance, le Maroc et d’autres pays stupides punissent d’emprisonnement ceux qui ne jeûnent pas pendant le Ramadan, et les cheikhs idiots de l’Arabie saoudite disent qu’il faut tuer ceux qui ne prient pas.

Tout ce que je demande, c’est la séparation de la religion et de la loi. Cela nécessite l’élimination des deux bases sur lesquelles est construit l’Islam, à savoir:

– l’idée selon laquelle le Coran est paroles de Dieu

– et l’idée que le Prophète Mahomet est infaillible.

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