Nous poursuivons dans ce billet la présentation de l’idéologie du Parti de libération islamique (HT). Ce Parti rejette le système démocratique et les droits de l’homme, discrimine les musulmans appartenant aux autres tendances, discrimine les femmes et les non-musulmans. C’est ce que nous verrons dans ce billet.
Rejet du système démocratique et des droits de l’homme
Le HT est contre le système démocratique. Il le dit expressément et en explique les raisons dans une publication en arabe et en anglais, rédigée par son émir Abdul-Qadeem Zalloom. Le premier paragraphe statue:
La démocratie que l’Occident mécréant (Kafir) encourage dans les pays musulmans est un système de Kufr. Elle n’a aucun rapport avec l’islam. Elle contredit totalement les règles de l’islam.
Le HT expose, dans cet ouvrage, ainsi que dans d’autres, les raisons pour lesquelles la démocratie est contraire aux normes islamiques. Ces raisons peuvent être résumées dans les points suivants:
– Dans la démocratie, c’est la raison humaine qui décide ce qui est bien et ce qui est mauvais. Dans l’islam, cette décision revient à Dieu et elle est révélée par ce dernier à Mahomet.
– La démocratie part du principe de la séparation de l’État et de la religion, abolissant le rôle de cette dernière dans la vie et dans l’État. Elle accorde à l’homme le droit d’établir le système qui doit le régir. L’islam par contre croit qu’il faut soumettre toutes les affaires de la vie et de l’État aux ordres et aux interdictions fixées par Dieu. Dans la démocratie, le peuple a le pouvoir législatif à la place de Dieu. L’adoption de la démocratie par un musulman viole les versets coraniques qui considèrent toute personne qui ne suit pas la loi de Dieu comme mécréante, injuste ou perverse (Coran 5:43, 44, 47). Les mécréants ou leurs agents qui gouvernent les pays musulmans et ceux qui prônent la démocratie, que ce soit des individus ou des mouvements, se rendent compte que la base de la démocratie est le rejet de la loi de Dieu. Ils parlent du pouvoir du peuple alors que le peuple est en fait gouverné par quelques capitalistes. Ils parlent de justice et de contrôle sur les dirigeants, chose théorique qui n’existe même pas aux États-Unis.
– La démocratie consacre des libertés qui sont contraires à la loi islamique. Il y a avant tout la liberté religieuse qui implique le droit de croire ou de ne pas croire ainsi que le droit de changer de religion. Or, l’islam punit de mort tout musulman qui apostasie, en vertu de la parole de Mahomet: “Celui qui change sa religion tuez-le”. Et s’il s’agit d’une apostasie collective, le groupe est combattu jusqu’à son retour à l’islam ou son extermination (sic). Il y a ensuite la liberté personnelle qui permet à la personne d’échapper à toute restriction, détruisant la famille et rendant la société occidentale animalière, abaissant le peuple à un niveau inférieur à celui de troupeaux d’animaux. En islam, cette liberté est restreinte par les ordres et les interdictions de Dieu. Toute violation de ses normes est punie. Ainsi les relations extra-matrimoniales et homosexuelles sont interdites, de même que la nudité et la consommation de l’alcool.
– La démocratie permet le multipartisme qui implique la création de partis qui prônent la mécréance ou la séparation de la religion de l’État, ou ayant une idéologie nationaliste. Or, l’islam ne permet le multipartisme que dans le cadre de la loi islamique.
Le HT estime que la démocratie fait partie du complot occidental contre les musulmans pour les éloigner de leur foi et les dominer. Dans la même logique, le HT est contre la conception des droits de l’homme qui consacre les libertés susmentionnées. Le HT dit que beaucoup de musulmans sont attirés par ce slogan à cause de l’oppression, de la torture et de la persécution infligées par leurs dirigeants. L’Occident demande aux musulmans d’accepter ces droits, dans le but de supprimer l’islam. Celui qui prône les droits d
e l’homme va contre l’islam.
Droits des musulmans d’autres tendances
Le HT croit que tout musulman doit appliquer la loi islamique comme faisant partie de sa foi. Il se propose d’enseigner ce projet de société à la communauté musulmane. Ceux qui s’y opposent, qu’ils soient des dirigeants, des intellectuels libéraux ou des laïcs en faveur de la séparation de l’État et de la religion sont considérés des apostats, des agents de l’Occident et des ennemis de l’islam. Rappelons ici la position du HT selon laquelle l’apostasie est punie de mort. Par apostasie on entend non seulement le changement de l’islam pour une autre religion, mais aussi la négation de toute norme considérée comme essentielle dans la loi islamique. Ainsi celui qui nie l’obligation d’appliquer la loi islamique, de rétablir le califat, voire de s’abstenir de consommer de l’alcool est considéré comme apostat.
En raison de cette position stricte, le HT a des difficultés à œuvrer conjointement avec les autres organisations islamiques qui veulent l’islamisation de la société à leur manière. Cette position lui vaut d’être rejeté tant par les régimes musulmans, que par différents groupes musulmans.
Comme nous l’avons dit dans le premier billet, la communauté musulmane est divisée en deux principaux groupes: les sunnites et les chiites, souvent en conflits entre eux et se rejetant mutuellement, malgré une tendance de rapprochement entre les deux. En principe, le HT ne serait pas opposé à ce qu’un chi’ite y adhère. Mais selon les dires d’un responsable du HT d’Asie centrale, l’État tel que préconisé par le HT ne permettra pas la présence des chi’ites sur son territoire.
Droits de la femme
Le projet constitutionnel dit que les femmes ont pour fonction principale d’être mères et maîtresses de maison. Elles doivent être séparées des hommes sauf dans les domaines impliquant un “besoin admis par la loi islamique comme la vente, ou lorsque cette loi permet la rencontre pour la réalisation d’un besoin comme le pèlerinage” (article 101).
Les femmes ne peuvent occuper les fonctions réservées par la loi islamique aux seuls hommes. C’est notamment le cas des fonctions impliquant l’exercice d’un pouvoir (articles 100-107). L’article 104 dit que la femme “ne peut exercer le pouvoir. Elle ne peut être ni Chef de l’État, ni juge de la Cour des plaintes, ni gouverneur, ni préfet. Elle ne peut entreprendre un acte quelconque comportant un pouvoir”.L’article 17 précise: “Ne peut exercer le pouvoir ou toute autre fonction considérée comme pouvoir qu’un homme, libre, équitable”.Le commentaire explique que l’interdiction d’octroyer une fonction impliquant un pouvoir à une femme se base sur un récit de Mahomet qui dit: “Une nation qui confie ses affaires à une femme ne peut connaître le succès”. À part ces restrictions, la femme peut pratiquement tout faire. L’article 102 dit:
Il sera donné à la femme les mêmes droits et les mêmes devoirs que l’homme, sauf ceux que l’islam, dans les sources de la loi islamique, réserve spécifiquement pour la femme ou pour l’homme. La femme a le droit de pratiquer le commerce, l’agriculture et l’industrie, de conclure des contrats, de faire des transactions, d’accéder à toute forme de propriété et d’accroître ses biens elle-même ou par l’intermédiaire d’un autre, et d’entreprendre elle-même toutes les activités de la vie.
L’article 103 ajoute:
La femme peut être nommée dans les fonctions étatiques et dans les fonctions judiciaires à l’exception de la Cour des plaintes; elle peut élire les membres du Conseil consultatif et y être élue, participer à l’élection du Chef de l’État et lui prêter le serment d’allégeance.
Droits des non-musulmans dans Dar al-islam
Le HT adopte la conception islamique classique relative à la division de la société à l’intérieur de Dar al-islam. Selon cette conception, les Gens sont soit musulmans, soit non-musulmans. Les non-musulmans sont repartis entre Gens du livre et Gens sans livre. Vient ensuite la catégorie des apostats: ceux qui abandonnent l’islam.
L’article 6 du projet constitutionnel dit que la loi islamique s’applique à tous les citoyens de Dar al-islam, quelle que soit leur religion. Toutefois, les Gens du livre sont soumis à leurs propres lois en matière de droit de la famille et dans les domaines des aliments et de l’habillement. Quant aux apostats, ils sont punis de mort. Le projet constitutionnel ne parle pas des Gens sans livre, mais selon la conception islamique classique, ces derniers n’ont pas le droit de vivre dans Dar al-islam et doivent se convertir à l’islam ou subir la guerre jusqu’à leur extermination.
L’article 5 du projet constitutionnel dit:
L’État ne peut discriminer un de ses ressortissants sur le plan du pouvoir, de la juridiction, de la gestion des affaires ou sur d’autres plans similaires. Bien au contraire, il doit traiter tous les citoyens d’une manière égale indépendamment de la race, de la religion, de la couleur ou de tout autre critère.
Toutefois, le projet constitutionnel prévoit des discriminations explicites ou implicites à l’égard des Gens du livre. L’article 17 dit: “Ne peut exercer le pouvoir ou toute autre fonction considérée comme pouvoir qu’un homme, libre, équitable. Il ne peut être que musulman”. Seuls les musulmans peuvent faire partie du conseil de consultation (shura) (article 26), élire le calife (articles 31 et 33) ou être candidat pour le califat. Les non-musulmans ne peuvent pas être nommés comme collaborateurs du calife (article 46), des chefs de provinces (article 62) ou occuper la fonction de juge (article 71 et 73). D’autre part, les Gens du livre doivent payer la jizyah, le tribut des vaincus (article 132).
En tant que régime appliquant la loi islamique dans son intégralité, il ne permet pas à un non-musulman d’épouser une musulmane, alors que le musulman peut épouser une non-musulmane qui appartient aux Gens du livre. En matière de liberté religieuse, tout non-musulman est encouragé de devenir musulman; mais, comme signalé plus haut, il est interdit aux musulmans d’abandonner l’islam, sous peine de mort. Ceci signifie que les non-musulmans ne peuvent pas faire du prosélytisme comme le font les musulmans. La liberté religieuse ne joue donc dans le modèle d’État du HT que dans un sens unique, à savoir la liberté de se convertir à l’islam.
Nous verrons dans le prochain billet la politique du HT à l’égard des pays musulmans.
Voir mes livres:
Avenir des musulmans en Occident: commander
Projets de constitutions et droits de l’homme islamiques: commander
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