Le droit musulman interdit l’homosexualité. Nous allons dans ce billet parler de l’homosexualité dans le Coran et la Sunnah (tradition de Mahomet), ensuite nous verrons la sanction de l’homosexualité et enfin la réalité sociale.
L’homosexualité dans le Coran
L’Ancien Testament (Gn 18 : 16-33 et 19 : 1-29) rapporte que les habitants de Sodome s’adonnaient aux rapports homosexuels et avaient cherché à abuser des invités mâles de Lot, raison pour laquelle Dieu aurait décidé de détruire la ville. S’inspirant de cette histoire de la ville de Sodome, la langue française parle de “sodomite” et “sodomie”, dont l’équivalent arabe est loti et loat, termes qui dérivent du nom de Lotet renvoie non pas au personnage biblique mais au peuple parmi lequel il vivait. Les termes arabes susmentionnés sont réservés aux rapports sexuels entre hommes. Quant aux rapports entre femmes, on utilise les termes sihaq (l’écrasement) et sahiqah (celle qui écrase).
Le Coran revient sur ce récit biblique dans plusieurs chapitres : 7 : 80-84; 11 : 74-83; 15 : 57-77; 21 : 74; 26 : 160-174; 27 : 54-58; 29 : 31-35; 37 : 133-138; 54 : 33-39. Cette répétition est interprétée par des auteurs musulmans comme indication de la grande aversion à l’égard de cette pratique et une volonté de la rendre répugnante aux lecteurs. Elle peut aussi signifier que Mahomet a été souvent confronté à ce phénomène. Les versets coraniques parlent des rapports entre hommes, et non pas entre femmes, Mais certains commentateurs estiment que les deux catégories sont désignés par le terme fahishah dans les versets 4 : 15 et 4 : 25.
L’homosexualité dans la sunnah
Mahomet revient sur l’homosexualité dans plusieurs récits dont nous citons certains :
Lorsqu’un homme monte un autre homme, le trône de Dieu tremble.
Tuez l’homme qui le fait et celui qui se fait faire.
Le sihaq (rapports lesbiens) des femmes est zina (adultère) entre elles.
Si un homme non marié est pris faisant la sodomie, il sera lapidé jusqu’à la mort.
Le monde ne prendra fin que lorsque les hommes se contentent des hommes, et les femmes des femmes. Les relations sexuelles entre les femmes constituent un adultère entre elles.
Si une femme a des relations sexuelles avec une femme, elles sont toutes deux adultères, et si un homme a des relations sexuelles avec un homme, ils sont tous deux adultères.
Si ma nation commet cinq choses, elle se ruinera : calomnier, consommer de l’alcool, se vêtir de soie, chanter, les hommes cherchant leur plaisir avec les hommes et les femmes avec les femmes.
Sanction de l’homosexualité
Le Coran ne prévoit pas de sanction contre l’homosexualité masculine ou féminine même s’il la condamne fermement. Les récits de Mahomet la considèrent comme adultère. Les juristes musulmans se sont partagés sur sa qualification.
Certains juristes qualifient les rapports homosexuels d’adultère et préconisent la lapidation pour le coupable marié, et la flagellation pour le non marié. Ils invoquent le Coran : “Pratiquez-vous la turpitude où nul ne vous avait devancé au monde? Vous pratiquez le désir avec les hommes au lieu des femmes? Vous êtes plutôt des gens excessifs” (7 : 80-81); “N’approchez pas la fornication. C’est une turpitude. Quelle mauvaise voie!” (17 : 32); “Les deux parmi vous qui pratiquent [la turpitude], faites-leur du mal” (4 : 16). On cite aussi les récits susmentionnés de Mahomet.
D’autres estiment que les rapports homosexuels n’entrent pas dans le délit d’adultère. Abu-Hanifah (décédé en 767) préconise l’emprisonnement jusqu’à la mort du coupable ou son repentir, et s’il est habitué à de telles pratiques, le gouverneur peut le tuer. On rapporte aussi que Khalid Ibn-al-Walid aurait demandé l’avis du Calife Ali (décédé en 661) sur ce qu’il devait faire d’un homme qui se faisait pénétrer. Ali répondit que ce délit était pratiqué par les gens de Lot, et Dieu nous a dit ce qu’il en a fait. De ce fait, je préconise qu’on le mette à mort par le feu. Et c’est ce que Khalid fit. Cette sanction aurait été appliquée par les califes Abu-Bakr, Ali, Abd-Allah Ibn-al-Zubayr et Hisham Ibn Abd-al-Malik. Certains juristes préconisent de jeter l’homosexuel, la tête en bas, du bâtiment le plus élevé de la localité et de le faire suivre par des pierres, à l’instar de la punition infligée par Dieu à Sodome. Citant Mahomet : “Si vous trouvez quelqu’un en train de pratiquer comme les gens de Lot, tuez-le ainsi que celui avec lequel il le fait”, un auteur moderne préconise la lapidation puisque Sodome a été détruite par des pierres venues du ciel (15 : 74).
Homosexualité et réalité sociale
La rigueur juridique à l’égard de l’homosexualité contraste avec la réalité sociale. Le juge tunisien Shihab-al-Din Al-Tifashi (décédé en 1253) a consacré un ouvrage aux rapports sexuels dans la société arabo-musulmane, y rapportant de nombreux récits d’homosexualité masculine et féminine. Les ouvrages modernes écrits contre l’homosexualité estiment que cette pratique a été introduite dans la société arabe par les Persans. À Bagdad, capitale des abbasides, les beaux esclaves mâles étaient payés plus chers que les esclaves femelles. Abu-Nawwas (décédé en 813), poète arabe d’origine persane, était connu pour ses débauches dans ce domaine. L’homosexualité était aussi répandue en Andalousie et dans l’empire ottoman. Dans ces sociétés, elle se pratiquait notamment entre hommes et enfants imberbes (amrad, ghulam, sabiy) âgés entre 10 et 21 ans. On trouve souvent dans les écrits arabes l’expression “il a un penchant pour les enfants”, ou plus discrètement “il a un penchant pour la beauté” (jamaly, ou yuhib al-jamal). Dans ces écrits, celui qui pénètre (loti) fait preuve de virilité (fuhuliyyah), quant au pénétré (ma’bun, mukhannath), il est efféminé, humilié.
Ce phénomène s’explique de trois manières :
– En raison de la séparation entre les hommes et les femmes, il était plus facile aux hommes de trouver des garçons que des filles pour avoir des rapports sexuels.
– Les marchés regorgeant de femmes esclaves, les hommes cherchaient à diversifier leurs objets de plaisir en s’en prenant aux garçons.
– Ne trouvant pas à se marier avec une femme, certains hommes se tournaient vers les garçons pour assouvir leurs besoins sexuels.
L’homosexualité se rencontrait dans différents milieux :
– L’armée : Les soldats turcs dans les pays qu’ils dominaient n’hésitaient pas à enlever les garçons et à les sodomiser.
– Les écoles : Dans la société musulmane il n’y avait pas d’écoles proprement dites, mais des enseignants privés qui accordaient ensuite des certificats aux jeunes qui s’attachaient à eux. Ces enseignants abusaient facilement des enfants qui leurs étaient confiés.
– Les milieux soufis : Certains cercles soufis habillaient de beaux garçons et les installaient au milieu de leurs rites de dévotion (dhikr). Cela tournait parfois à la sodomie. Le coït d’un garçon était sensé lui transmettre l’esprit soufi. Au Maroc du début du XXe siècle, la baraka du marabout ou du sharif (descendant du Prophète) se transmettai
t par le coït du disciple.
– Les bars : Ces locaux employaient des jeunes garçons pour attirer leurs clients, devenant des lieux de débauche.
– Les hammams : Ici les garçons servaient à laver les clients à huis clos.
– Les esclaves : Les rapports sexuels avec une femme esclave étaient libres, mais il arrivait que le maître abuse aussi de ses esclaves mâles.
Shihab-al-Din Ibn-Ahmad Al-Abshihi (décédé en 1446) raconte qu’un marchand est allé se plaindre auprès du juge de Homs (en Syrie). Il le trouva couché sur son ventre se laissant pénétrer par un garçon. Le juge expliqua au plaignant que le père du garçon est mort laissant une grande fortune; il fut donc mis sous la tutelle du juge. Certains sont venus demander au juge de lui remettre sa fortune du fait qu’il est devenu majeur. Pour en avoir la conviction, le juge lui a fait passer le test de la majorité, à savoir qu’il pouvait éjaculer.
Serhane explique que dans les milieux traditionnels marocains, les parents envoient leurs enfants mâles aux écoles coraniques. Dans ces écoles, les enfants sont confiés au faqih (savant religieux), du lever du jour jusqu’au coucher du soleil. L’autorité de ce faqih est illimitée. L’enfant peut faire l’objet de la sodomisation qu’il subit dans la peur, la soumission et la violence. Ces écoles, dont le but est l’apprentissage de la parole divine, peuvent servir également de cours tacites de pédérastie appliquée avec ou sans le concours de l’honorable maître de l’école. C’est un lieu de contradiction où le Coran peut cohabiter avec le viol. Un proverbe marocain dit : “Qui veut apprendre doit passer sous le maître”. Tout le monde l’accepte comme s’il s’agissait d’un rite pendant lequel le faqih fait passer sa bénédiction et son savoir à ses élèves par le biais de la sexualité. Bien que tout le monde soit au courant des pratiques du faqih, les gens obligent leurs enfants à se rendre à l’école coranique et ferment les yeux sur les pratiques homosexuelles, voire pédophiles, qui s’exercent dans ces lieux. Cette complicité voulue, maintenue, a de tout temps favorisé le développement de la pédérastie dans le milieu traditionnel marocain. Et c’est à dessein que les parents n’envoient que les enfants mâles aux écoles coraniques. Connaissant les perversités du faqih, ils préfèrent limiter les dégâts, protégeant ainsi la virginité de leurs filles. Serhane ajoute que les parents tolèrent ce genre de pratiques chez un homme qui porte en son sein la parole divine. Comment, en effet, peut-on accuser un homme qui a appris le Coran? Dans l’esprit traditionnel, le viol du faqih n’est pas considéré comme un véritable viol puisque l’homme est un illuminé de Dieu. Certaines personnes vont même jusqu’à croire que le sperme du faqih comprend une dose d’intelligence et de bénédiction divine qu’il est souhaitable que le maître coranique transmette directement à l’élève. Ce dernier doit donc mettre son corps à la disposition de l’homme du Coran.
Aujourd’hui les homosexuels sont victimes d’une chasse aux sorcières dans les pays arabo-musulmans. C’est le cas par exemple en Égypte. En novembre 2006, l’Iran a exécuté un jeune homme pour délit d’homosexualité. Malgré cela, on trouve de nombreux sites internet qui sont consacrés à l’homosexualité arabe et islamique.
Pour les références, voir mon ouvrage Introduction au droit arabe: droit de la famille et des successions, droit pénal, droit médical, droit socio-économique, Createspace (Amazon), Charleston, 2e édition, 2012, 534 pages Amazon.fr
Les versets du Coran sont pris de ma traduction: Le Coran: texte arabe et traduction française par ordre chronologique selon l’Azhar, avec renvoi aux variantes, aux abrogations et aux écrits juifs et chrétiens.
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