Le mot ramadân (en arabe : رَمَضَان ) signifie “chaleur intense”. Il vient d’une racine araméenne et hébraïque : r m ç, qui signifie “braise”, “fournaise”.
En effet “Ramadân” s’écrivait “Ramaçân” à l’origine, car la lettre emphatique “çad”ص de l’araméen et de l’hébreu a été transformée en “dad” ض emphatique de l’alphabet arabe. En effet, un simple point diacritique au-dessus de la lettre, distingue le çad ص du dad ض . Or dans les premiers manuscrits du Coran, la diacritisation des lettres n’existait pas encore.
A l’époque préislamique, ce mois de Ramadân-Ramaçân fut ainsi nommé parce qu’il tombait lors de la saison des grosses chaleurs selon le calendrier judéo-rabbinique luni-solaire, appelé ainsi car il intercale 7 années de 13 mois lunaires, appelées “embolismiques”, dans un cycle de 19 ans. Et cela pour réajuster le décompte du calendrier lunaire avec celui du calendrier solaire.
Mais plus tard (à Médine ?), l’islam voulut s’émanciper de la tutelle judaïque, et rejeta les années embolismiques de 13 mois lunaires. De telle sorte que le calendrier musulman ne possède que des années de 12 mois lunaires. Il est donc exclusivement lunaire.
Mais il en résulta un grave problème. Le total de 12 mois lunaires donne 354-355 jours. Il manque donc plus de 11 jours par rapport au cycle de l’année solaire qui est de 365 jours et un quart environ C’est ce qui explique la récession de 11 jours par an entre le mois de Ramadân-Ramaçân originellement estival, et les saisons du cycle solaire. Cette récession étant d’une année tous les 33-34 ans environ, le Ramadân-Ramaçân retombe alors sur son point de départ estival tous les 33-34 ans.
Un musulman de plus de 34 ans a donc pu voir le Ramadân-Ramaçân traverser toutes les saisons de l’année solaire.
Cette année 2017, le Ramadân-Ramaçân débutera un 26 ou un 27 Mai (selon la vision oculaire de la Nouvelle Lune). Donc, à la saison printanière. Mais il y 5 ans, le Ramadân-Ramaçân coïncidait avec Noël, donc en hiver ! Bref, le mois de Ramadân-Ramaçân “bouge“.
Cette digression sur le calendrier est indispensable à la compréhension de l’essence même du jeune duRamadân. Voici pourquoi :
Le jeûne quotidien (du lever du soleil à son couchant) lors du mois de Ramadân, est considéré comme le symbole-même de la pratique religieuse musulmane. Mais, comble du paradoxe, il n’est mentionné qu’une seule fois dans tout le Coran, et en termes assez vagues, au verset 185 de la sourate 2, que voici en arabe, avec sa traduction littérale en français :
شَهْرُ رَمَضَانَ الَّذِي أُنْزِلَ فِيهِ الْقُرْآنُ هُدًى لِلنَّاسِ وَبَيِّنَاتٍ مِنَ الْهُدَى وَالْفُرْقَانِ فَمَنْ شَهِدَ مِنْكُمُ الشَّهْرَ فَلْيَصُمْهُ وَمَنْ كَانَ مَرِيضًا أَوْ عَلَى سَفَرٍ فَعِدَّةٌ مِنْ أَيَّامٍ أُخَرَ يُرِيدُ اللَّهُ بِكُمُ الْيُسْرَ وَلَا يُرِيدُ بِكُمُ الْعُسْرَ وَلِتُكْمِلُوا الْعِدَّةَ وَلِتُكَبِّرُوا اللَّهَ عَلَى مَا هَدَاكُمْ وَلَعَلَّكُمْ تَشْكُرُونَ
le croissant de ramadân dans lequel a été descendu le coran est un guide pour les gens et évidences de la guidance et de la rédemption alors quiconque témoignera parmi vous du croissant, alors qu’il jeûne ; et quiconque est malade ou en éloignement alors qu’il destine d’autres jours ; allah veut pour vous l’aisance et il ne veut pas pour vous la gêne afin que vous complétiez les cérémonies et que vous grandissiez allah sur ce en quoi il vous a guidés et afin que soyez reconnaissants
D’après ce verset, il ne s’agit nullement de jeûner tout le mois, mais uniquement le jour qui suit le témoignage de la vision oculaire du filament du croissant de la Nouvelle Lune, ce qu’on appelle la “Néoménie”.
Au départ, ce jeûne était donc imposé exclusivement aux témoins oculaires de la “Nouvelle Lune” (qu’on ne peut voir qu’au crépuscule). Et c’est par extension cultuelle qu’il est devenu un jeûne public.
Mais ce jeûne suite à la vision au crépuscule du filament du croissant de la Nouvelle Lune n’est pas non plus une invention coranique ou musulmane. Le Coran lui-même le dit expressément au verset 183 de la sourate 2 :
يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُوا كُتِبَ عَلَيْكُمُ الصِّيَامُ كَمَا كُتِبَ عَلَى الَّذِينَ مِنْ قَبْلِكُمْ لَعَلَّكُمْ تَتَّقُونَ
ô et ohé ceux qui croient, il vous a été prescrit le jeûne comme il l’a été prescrit à ceux qui vous ont devancés afin que vous soyez craignants
Lorsque le Coran évoque “ceux qui ont devancé” les musulmans dans la pratique de ce jeûne, il fait évidemment allusion aux “juifs” !
Ce “jeûne de la Nouvelle Lune” était en effet une tradition judaïco-talmudique qui se pratiquait tous les mois, mais plus particulièrement lors du mois de Ab, donc en plein été, et qui commémorait la destruction du Temple de Jérusalem.
Cette commémoration de la destruction du Premier Temple de Jérusalem par Nabuchodonosor le roi babylonien, puis du Deuxième Temple, par Titus l’empereur romain, débutait à la nouvelle lune du mois deAb (et même avant, au 17 du mois de Tamouz), et culminait selon la Bible au 7 et au 10 du mois de Ab (et non au 9, selon les rabbins pharisiens). Donc 3 semaines, appelées “laps de temps entre deux malheurs” et qui étaient des jours de mortification, de deuil et de jeûne !
Mais déjà au Vème siècle après J.-C, un certain courant judaïque qui plus tard donnera naissance aux “Endeuillés de Sion” (“Sion” étant le nom affectif de Jérusalem) étendit cette période de deuil et d’affliction à tout le mois de Ab. ! Et ce n’est que lorsque ce mois de Ab s’achevait qu’il était autorisé de manger de la viande, en souvenir symbolique de l’offrande de bétail (ovin ou bovin) que les desservants (“Cohanim“) du Temple de Jérusalem sacrifiaient sur l’Autel de Yahweh.
Entre parenthèses, il est à noter qu’on retrouve d’ailleurs la symbolique de ce sacrifice, dans la fête musulmane de ‘Id el fitr qui clôture le jeûne du Ramadân-Ramaçân.
Mais revenons à ce courant judaïque des “Endeuillés de Sion”. Ils firent de la surenchère mortifère, et prohibèrent toute manifestation d’allégresse (et même les bains estivaux) durant tout le mois de Ab.Certains allèrent même jusqu’à jeûner tout le mois, de l’aube au crépuscule !
Cependant, et à la différence de la tradition musulmane (commémorant la “descente” du Coran), ce jeûne judaïque des “Endeuillés de Sion” – commémorant les deux destructions du Temple de Jérusalem -, leur était obligatoire seulement du 1 au 10 du mois de Ab, mais facultatif les 20 autres derniers jours.
Et c’est justement ce jeûne des “Endeuillés de Sion” qu’un rabbin ordonna à Waraqa Ibn Nafl, le mentor-scribe de Muhammad ! Tout musulman doit donc savoir qu’en vérité le jeûne du Ramadân n’était à l’origine qu’une commémoration judaïque de la destruction du Temple de Jérusalem.
Que doit donc faire aujourd’hui un musulman s’il veut être fidèle à la lettre et à l’esprit du Coran ?
1. S’il n’a pas été lui-même le témoin oculaire du filament du croissant de nouvelle lune, son jeûne est facultatif.
2. S’il veut quand même jeûner par identification avec les témoins oculaires, il peut le faire, mais seulement le jour suivant le témoignage oculaire.
3. S’il désire commémorer – à la manière des Juifs -, la destruction du Temple de Jérusalem, il peut également jeûner du 1 au 10 du mois de Ab, c’est-à-dire du mois de Ramadân-Ramaçân.
4. S’il désire faire de la surenchère à la manière des “Endeuillés de Sion”, alors il pourra comme eux, jeûner tout le mois. Mais cela lui est déconseillé par le Coran qui enseigne : ” Allah veut pour vous l’aisance et il ne veut pas pour vous la gêne “
Les musulmans sont donc appelés à relire ce que disent exactement les versets coraniques concernant le jeûne du Ramadân. Et ce, avec des yeux nouveaux – comme on scruterait le croissant de la nouvelle lune -, afin de ne pas se fier aveuglément aux exégèses et manipulations musulmanes tardives désirant émanciper le Coran de l’influence du judaïsme.
David A. Belhassen
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