Nous poursuivons ici les articles sur les interdits alimentaires chez les juifs, les chrétiens et les musulmans
L’abolition presque totale des interdits
Les interdits religieux juifs ont été pour la plus part abolis par les chrétiens. On trouve une ébauche de cette abolition chez Jésus qui déclara: « Il n’est rien d’extérieur à l’homme qui, pénétrant en lui, puisse le souiller, mais ce qui sort de l’homme, voilà ce qui souille l’homme », à savoir « les desseins pervers ». Et Marc de commenter: « ainsi il déclarait purs tous les aliments » (Mc 7:15, 19-22).
La communauté chrétienne s’est heurtée dès ses débuts aux interdits alimentaires juifs. Les Actes des apôtres nous content l’aventure de Pierre avec un centurion romain appelé Corneille. Il est important de lire complètement le texte qui éclaire sur les interdits alimentaires chez les juifs et comment ils furent abolis:
Le chapitre 10 nous dit:
- Il y avait à Césarée un homme du nom de Corneille, centurion de la cohorte Italique.
- Pieux et craignant Dieu, ainsi que toute sa maison, il faisait de larges aumônes au peuple juif et priait Dieu sans cesse.
- Il eut une vision. Vers la neuvième heure du jour, l’Ange de Dieu – il le voyait clairement – entrait chez lui et l’appelait : « Corneille ! »
- Il le regarda et fut pris de frayeur. » Qu’y a-t-il, Seigneur ? » demanda-t-il. – « Tes prières et tes aumônes, lui répondit l’Ange, sont montées devant Dieu, et il s’est souvenu de toi.
- Maintenant donc, envoie des hommes à Joppé et fais venir Simon, surnommé Pierre.
- Il loge chez un certain Simon, un corroyeur, dont la maison se trouve au bord de la mer. »
- Quand l’ange qui lui parlait fut parti, Corneille appela deux de ses domestiques ainsi qu’un soldat pieux, de ceux qui lui étaient attachés,
- et après leur avoir tout expliqué, il les envoya à Joppé.
- Le lendemain, tandis qu’ils faisaient route et approchaient de la ville, Pierre monta sur la terrasse, vers la sixième heure, pour prier.
- Il sentit la faim et voulut prendre quelque chose. Or, pendant qu’on lui préparait à manger, il tomba en extase.
- Il voit le ciel ouvert et un objet, semblable à une grande nappe nouée aux quatre coins, en descendre vers la terre.
- Et dedans il y avait tous les quadrupèdes et les reptiles, et tous les oiseaux du ciel.
- Une voix lui dit alors : « Allons, Pierre, immole et mange. »
- Mais Pierre répondit : « Oh non ! Seigneur, car je n’ai jamais rien mangé de souillé ni d’impur ! »
- De nouveau, une seconde fois, la voix lui parle : « Ce que Dieu a purifié, toi, ne le dis pas souillé. »
- Cela se répéta par trois fois, et aussitôt l’objet fut remporté au ciel.
- Tout perplexe, Pierre était à se demander en lui-même ce que pouvait bien signifier la vision qu’il venait d’avoir, quand justement les hommes envoyés par Corneille, s’étant enquis de la maison de Simon, se présentèrent au portail.
- Ils appelèrent et s’informèrent si c’était bien là que logeait Simon surnommé Pierre.
- Comme Pierre était toujours à réfléchir sur sa vision, l’Esprit lui dit : « Voilà des hommes qui te cherchent.
- Va donc, descends et pars avec eux sans hésiter, car c’est moi qui les ai envoyés. »
- Pierre descendit auprès de ces hommes et leur dit : « Me voici. Je suis celui que vous cherchez. Quel est le motif qui vous amène ? »
- Ils répondirent : « Le centurion Corneille, homme juste et craignant Dieu, à qui toute la nation juive rend bon témoignage, a reçu d’un ange saint l’avis de te faire venir chez lui et d’entendre les paroles que tu as à dire. »
- Pierre les fit alors entrer et leur donna l’hospitalité. Le lendemain, il se mit en route et partit avec eux ; quelques-uns des frères de Joppé l’accompagnèrent.
- Il entra dans Césarée le jour suivant. Corneille les attendait et avait réuni ses parents et ses amis intimes.
- Au moment où Pierre entrait, Corneille vint à sa rencontre et, tombant à ses pieds, se prosterna.
- Mais Pierre le releva en disant : « Relève-toi. Je ne suis qu’un homme, moi aussi. »
- Et tout en s’entretenant avec lui, il entra. Il trouve alors les gens qui s’étaient réunis en grand nombre,
- et il leur dit : « Vous le savez, il est absolument interdit à un Juif de frayer avec un étranger ou d’entrer chez lui. Mais Dieu vient de me montrer, à moi, qu’il ne faut appeler aucun homme souillé ou impur.
- Aussi n’ai-je fait aucune difficulté pour me rendre à votre appel. Je vous le demande donc, pour quelle raison m’avez-vous fait venir ? »
- Corneille répondit : « Il y a maintenant trois jours, j’étais en prière chez moi à la neuvième heure et voici qu’un homme surgit devant moi, en vêtements resplendissants.
- Il me dit : «Corneille, ta prière a été exaucée, et de tes aumônes on s’est souvenu auprès de Dieu.
- Envoie donc quérir à Joppé Simon, surnommé Pierre. Il loge dans la maison du corroyeur Simon, au bord de la mer. »
- Aussitôt je t’ai donc fait chercher, et toi, tu as bien fait de venir. Nous voici donc tous devant toi pour entendre ce qui t’a été prescrit par Dieu. »
- Alors Pierre prit la parole et dit : « Je constate en vérité que Dieu ne fait pas acception des personnes,
- mais qu’en toute nation celui qui le craint et pratique la justice lui est agréable.
- « Il a envoyé sa parole aux Israélites, leur annonçant la bonne nouvelle de la paix par Jésus Christ : c’est lui le Seigneur de tous.
- Vous savez ce qui s’est passé dans toute la Judée : Jésus de Nazareth, ses débuts en Galilée, après le baptême proclamé par Jean ;
- comment Dieu l’a oint de l’Esprit Saint et de puissance, lui qui a passé en faisant le bien et en guérissant tous ceux qui étaient tombés au pouvoir du diable ; car Dieu était avec lui.
- Et nous, nous sommes témoins de tout ce qu’il a fait dans le pays des Juifs et à Jérusalem. Lui qu’ils sont allés jusqu’à faire mourir en le suspendant au gibet,
- Dieu l’a ressuscité le troisième jour et lui a donné de se manifester,
- non à tout le peuple, mais aux témoins que Dieu avait choisis d’avance, à nous qui avons mangé et bu avec lui après sa résurrection d’entre les morts ;
- et il nous a enjoint de proclamer au Peuple et d’attester qu’il est, lui, le juge établi par Dieu pour les vivants et les morts.
- C’est de lui que tous les prophètes rendent ce témoignage que quiconque croit en lui recevra, par son nom, la rémission de ses péchés. »
- Pierre parlait encore quand l’Esprit Saint tomba sur tous ceux qui écoutaient la parole.
- Et tous les croyants circoncis qui étaient venus avec Pierre furent stupéfaits de voir que le don du Saint Esprit avait été répandu aussi sur les païens.
- Ils les entendaient en effet parler en langues et magnifier Dieu. Alors Pierre déclara :
- « Peut-on refuser l’eau du baptême à ceux qui ont reçu l’Esprit Saint aussi bien que nous ? »
- Et il ordonna de les baptiser au nom de Jésus Christ. Alors ils le prièrent de rester quelques jours avec eux.
Mais les choses ne passèrent pas sans problème. Le chapitre 11 dit:
- Cependant les apôtres et les frères de Judée apprirent que les païens, eux aussi, avaient accueilli la parole de Dieu.
- Quand donc Pierre monta à Jérusalem, les circoncis le prirent à partie :
- « Pourquoi, lui demandèrent-ils, es-tu entré chez des incirconcis et as-tu mangé avec eux ? »
- Pierre alors se mit à leur exposer toute l’affaire point par point :
- « J’étais, dit-il, en prière dans la ville de Joppé quand, en extase, j’eus une vision : du ciel un objet descendait, semblable à une grande nappe qui s’abaissait, tenue aux quatre coins, et elle vint jusqu’à moi.
- Je regardais, ne la quittant pas des yeux, et j’y vis les quadrupèdes de la terre, les bêtes sauvages, les reptiles ainsi que les oiseaux du ciel.
- J’entendis alors une voix me dire : «Allons, Pierre, immole et mange. »
- Je répondis : «Oh non ! Seigneur, car rien de souillé ni d’impur n’entra jamais dans ma bouche ! »
- Une seconde fois, la voix reprit du ciel : «Ce que Dieu a purifié, toi, ne le dis pas souillé. »
- Cela se répéta par trois fois, puis tout fut de nouveau retiré dans le ciel.
- « Juste au même moment, trois hommes se présentèrent devant la maison où nous étions ; ils m’étaient envoyés de Césarée.
- L’Esprit me dit de les accompagner sans scrupule. Les six frères que voici vinrent également avec moi et nous entrâmes chez l’homme en question.
- Il nous raconta comment il avait vu un ange se présenter chez lui et lui dire : «Envoie quérir à Joppé Simon, surnommé Pierre.
- Il te dira des paroles qui t’apporteront le salut, à toi et à toute ta famille. »
- « Or, à peine avais-je commencé à parler que l’Esprit Saint tomba sur eux, tout comme sur nous au début.
- Je me suis alors rappelé cette parole du Seigneur : Jean, disait-il, a baptisé avec de l’eau mais vous, vous serez baptisés dans l’Esprit Saint.
- Si donc Dieu leur a accordé le même don qu’à nous, pour avoir cru au Seigneur Jésus Christ, qui étais-je, moi, pour faire obstacle à Dieu. »
- Ces paroles les apaisèrent, et ils glorifièrent Dieu en disant : « Ainsi donc aux païens aussi Dieu a donné la repentance qui conduit à la vie ! »
Le chapitre 15 nous relate le premier concile:
- Cependant certaines gens descendus de Judée enseignaient aux frères : « Si vous ne vous faites pas circoncire suivant l’usage qui vient de Moïse, vous ne pouvez être sauvés. »
- Après bien de l’agitation et une discussion assez vive engagée avec eux par Paul et Barnabé, il fut décidé que Paul, Barnabé et quelques autres des leurs monteraient à Jérusalem auprès des apôtres et des anciens pour traiter de ce litige.
- Eux donc, après avoir été escortés par l’Église, traversèrent la Phénicie et la Samarie, racontant la conversion des païens, et ils causaient une grande joie à tous les frères.
- Arrivés à Jérusalem, ils furent accueillis par l’Église, les apôtres et les anciens, et ils rapportèrent tout ce que Dieu avait fait avec eux.
- Mais certaines gens du parti des Pharisiens qui étaient devenus croyants intervinrent pour déclarer qu’il fallait circoncire les païens et leur enjoindre d’observer la Loi de Moïse.
- Alors les apôtres et les anciens se réunirent pour examiner cette question.
- Après une longue discussion, Pierre se leva et dit : « Frères, vous le savez : dès les premiers jours, Dieu m’a choisi parmi vous pour que les païens entendent de ma bouche la parole de la Bonne Nouvelle et embrassent la foi.
- Et Dieu, qui connaît les cœurs, a témoigné en leur faveur, en leur donnant l’Esprit Saint tout comme à nous.
- Et il n’a fait aucune distinction entre eux et nous, puisqu’il a purifié leur cœur par la foi.
- Pourquoi donc maintenant tentez-vous Dieu en voulant imposer aux disciples un joug que ni nos pères ni nous-mêmes n’avons eu la force de porter ?
- D’ailleurs, c’est par la grâce du Seigneur Jésus que nous croyons être sauvés, exactement comme eux. »
- Alors toute l’assemblée fit silence. On écoutait Barnabé et Paul exposer tout ce que Dieu avait accompli par eux de signes et prodiges parmi les païens.
- Quand ils eurent cessé de parler, Jacques prit la parole et dit : « Frères, écoutez-moi.
- Syméon a exposé comment, dès le début, Dieu a pris soin de tirer d’entre les païens un peuple réservé à son Nom.
- Ce qui concorde avec les paroles des Prophètes, puisqu’il est écrit :
- Après cela je reviendrai et je relèverai la tente de David qui était tombée , je relèverai ses ruines et je la redresserai,
- afin que le reste des hommes cherchent le Seigneur, ainsi que toutes les nations qui ont été consacrées à mon Nom, dit le Seigneur qui fait
- connaître ces choses depuis des siècles.
- « C’est pourquoi je juge, moi, qu’il ne faut pas tracasser ceux des païens qui se convertissent à Dieu.
- Qu’on leur mande seulement de s’abstenir de ce qui a été souillé par les idoles, des unions illégitimes, des chairs étouffées et du sang.
- Car depuis les temps anciens Moïse a dans chaque ville ses prédicateurs, qui le lisent dans les synagogues tous les jours de sabbat. »
- Alors les apôtres et les anciens, d’accord avec l’Église tout entière, décidèrent de choisir quelques-uns d’entre eux et de les envoyer à Antioche avec Paul et Barnabé. Ce furent Jude, surnommé Barsabbas, et Silas, hommes considérés parmi les frères.
- Ils leur remirent la lettre suivante : « Les apôtres et les anciens, vos frères, aux frères de la gentilité qui sont à Antioche, en Syrie et en Cilicie, salut !
- Ayant appris que, sans mandat de notre part, certaines gens venus de chez nous ont, par leurs propos, jeté le trouble parmi vous et bouleversé vos esprits,
- nous avons décidé d’un commun accord de choisir des délégués et de vous les envoyer avec nos bien-aimés Barnabé et Paul,
- ces hommes qui ont voué leur vie au nom de notre Seigneur Jésus Christ.
- Nous vous avons donc envoyé Jude et Silas, qui vous transmettront de vive voix le même message.
- L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas vous imposer d’autres charges que celles-ci, qui sont indispensables :
- vous abstenir des viandes immolées aux idoles, du sang, des chairs étouffées et des unions illégitimes. Vous ferez bien de vous en garder. Adieu. »
- Prenant congé donc, les délégués descendirent à Antioche, où ils réunirent l’assemblée et remirent la lettre.
- Lecture en fut faite, et l’on se réjouit de l’encouragement qu’elle apportait.
On remarquera ici que ce concile a aboli aussi l’obligation de la circoncision. Pour les juifs, les non circoncis étaient considérés comme impurs et par conséquent ils ne devaient pas les fréquenter. Désormais, on peut être chrétien et aspirer au salut sans devoir être circoncis ou observer les interdits alimentaires juifs.
Le conflit concernant les interdits alimentaires parmi les chrétiens se poursuivit. Dans sa lettre aux Galates, chapitre 2, Paul nous dit:
- Mais quand Céphas vint à Antioche, je lui résistai en face, parce qu’il s’était donné tort.
- En effet, avant l’arrivée de certaines gens de l’entourage de Jacques, il prenait ses repas avec les païens ; mais quand ces gens arrivèrent, on le vit se dérober et se tenir à l’écart, par peur des circoncis.
- Et les autres Juifs l’imitèrent dans sa dissimulation, au point d’entraîner Barnabé lui-même à dissimuler avec eux.
- Mais quand je vis qu’ils ne marchaient pas droit selon la vérité de l’Évangile, je dis à Céphas devant tout le monde : « Si toi qui es Juif, tu vis comme les païens, et non à la juive, comment peux-tu contraindre les païens à judaïser ?
- « Nous sommes, nous, des Juifs de naissance et non de ces pécheurs de païens ;
- et cependant, sachant que l’homme n’est pas justifié par la pratique de la Loi, mais seulement par la foi en Jésus Christ, nous avons cru, nous aussi, au Christ Jésus, afin d’obtenir la justification par la foi au Christ et non par la pratique de la Loi, puisque par la pratique de la Loi personne ne sera justifié.
La question de ces interdits revient dans les épîtres de St. Paul. Celui-ci établit une règle large en matière de nourriture dans sa première épître aux Corinthiens, tout en évitant de faire scandale. Il écrit:
Tout ce qui se vend au marché, mangez-le sans poser de question par motif de conscience; car la terre est au Seigneur, et tout ce qui la remplit (Ps 24:1). Si quelque infidèle vous invite et que vous acceptiez d’y aller, mangez tout ce qu’on vous sert, sans poser de question par motif de conscience. Mais si quelqu’un vous dit: « Ceci a été immolé en sacrifice », n’en mangez pas, à cause de celui qui vous a prévenus, et par motif de conscience. Par conscience j’entends non la vôtre, mais celle d’autrui; car pourquoi ma liberté relèverait-elle du jugement d’une conscience étrangère? Si je prends quelque chose en rendant grâce, pourquoi serais-je blâmé pour ce dont je rends grâce (I Co 10:25:30).
Dans cette même épître, Paul permet même de manger de la viande immolée aux idoles parce que « nous savons qu’une idole n’est rien dans le monde et qu’il n’est de Dieu que le Dieu unique ». Mais il demande de s’en abstenir devant une personne faible qui croit qu’il est interdit de manger de la viande immolée aux idoles afin de ne pas le scandaliser et de ne pas le pousser à enfreindre sa propre conscience. Pour Paul, la science en soi ne suffit pas: « la science enfle », alors que « la charité édifie ». « C’est pourquoi, si un aliment doit causer la chute de mon frère, je me passerai de viande à tout jamais, afin de ne pas causer la chute de mon frère » (I Co chap. 8)
Dans son épître aux Romains, il écrit:
Tel croit pouvoir manger de tout, tandis que le faible ne mange que des légumes: que celui qui mange ne méprise pas l’abstinent et que l’abstinent ne juge pas celui qui mange; Dieu l’a bien accueilli. Toi, qui es-tu pour juger un serviteur d’autrui?… Je le sais, j’en suis certain dans le Seigneur Jésus, rien n’est impur en soi, mais seulement pour celui qui estime un aliment impur; en ce cas il l’est pour lui… Le règne de Dieu n’est pas affaire de nourriture ou de boisson, il est justice, paix et joie dans l’Esprit Saint (Rm 14:2-4, 14 et 17).
L’interdiction de consommer du sang, aujourd’hui tombée en désuétude, était respectée par les chrétiens. Tertullien (d. 222?) en parle dans ses écrits. Aussi tard qu’en 692, le Concile in Trullo (Constantinople) interdit la consommation de toute nourriture contenant du sang, sous peine d’excommunication pour les peuples et de destitution pour les prêtres.
L’interdiction du cheval
On trouve des interdits alimentaires religieux chez les chrétiens à travers les siècles. Ainsi à l’époque mérovingienne (8ème siècle) le pape Grégoire III et son successeur Zacharie 1er jettent l’anathème sur la viande de cheval. Cette position visait en fait à écarter les Germains païens des banquets chevalins impies immolés au culte d’Odin. Toutes les fois qu’un scandinave, même converti, mange de l’équidé, il fait allégeance à son ancienne croyance et donc renie la foi chrétienne. Le sacrifice païen est la vraie raison de l’interdit alimentaire. Pour détruire la mémoire, le clergé fait regarder cette viande comme impure et ceux qui en usent comme immondes. Plus tard, l’évangélisation ancrée, l’effet survit à la cause tombée progressivement dans l’oubli. La viande n’est plus impure, abominable au point de vue religieux, cependant elle reste dans l’esprit des gens, un aliment malsain ou tout au moins hors du commun. Elle ne fut réintroduite qu’à la retraite de Russie où il fallait l’avaler. Et aujourd’hui les boucheries chevalines ferment les unes après les autres à la suite des campagnes de protection des animaux.
L’abstinence
Les chrétiens sont censés observer une abstinence de la viande les jours de vendredi et du carême, norme de moins en moins respectée, alors que jadis la violation de cette norme était sévèrement punie. Et aujourd’hui on constate un glissement de l’interdit religieux aux normes diététiques: on s’abstient de certains aliments pour garder sa ligne au lieu de sauver son âme.
Les groupes chrétiens observant des interdits alimentaires
Certains groupes religieux chrétiens continuent à observer des interdits alimentaires bibliques.
C’est notamment le cas des Adventistes qui recommandent une nourriture ovo-lacto-végétarienne et le respect des interdits bibliques sur les animaux. Ils estiment en effet que « la distinction entre les animaux purs et impurs date de l’époque de Noé, longtemps avant l’existence d’Israël. En tant que principes de santé, ces lois diététiques sont toujours valables ». De plus, ils recommandent de s’abstenir de fumer (fumer c’est se suicider lentement, et donc contre le commandement: « Tu ne tueras point » (Ex 20:13)) et de consommer des aliments contenant de la théine, de la caféine et de l’alcool. Pour la sainte scène ils utilisent le jus de raisin au lieu du vin. Bien qu’ils s’abstiennent de manger du sang (boudin, etc.), ils ne s’opposent pas à la transfusion sanguine comme le font les Témoins de Jéhovah.
Les Mormons n’observent pas les interdits bibliques sur les animaux mais recommandent de ne pas consommer du sang (boudin, etc.). Par contre, ils s’abstiennent de fumer et de consommer des aliments contenant de la théine, de la caféine et de l’alcool.
Les Témoins de Jéhovah n’observent pas les interdits bibliques sur les animaux et boivent du vin, mais ils interdisent la consommation du sang et la transfusion sanguine, tout comme ils interdisent de fumer invoquant St. Paul: « Bien-aimés, purifions-nous de toute souillure de la chair et de l’esprit » (II Co 7:1).
Bien que tous ces trois groupes soient opposés à la consommation du sang à des degrés divers, ils n’exigent pas l’abattage rituel tel que pratiqué par les juifs. De même, ils ignorent la norme biblique qui interdit de mêler la viande au lait.
Il y a aussi des ordres religieux comme les Chartreux qui font de la privation constante de toute viande un point fondamental de leur règle. On lit dans le chapitre 7 des Statuts de l’Ordre des Chartreux:
Selon une observance introduite par nos premiers pères et toujours gardée avec un soin particulier, nous avons renoncé à l’usage de la viande. C’est en effet un trait caractéristique de l’Ordre et un signe de l’austérité érémitique en laquelle, Dieu aidant, nous voulons demeurer.
Conclusion
On peut donc conclure que les chrétiens, si l’on excepte des groupes mineurs, ne connaissent pas d’interdits alimentaires religieux. Et si aujourd’hui les chrétiens occidentaux ne mangent pas de rats ou de chiens, ceci relève plus des coutumes culinaires que d’interdits religieux.
Dans le prochain article je parlerai des interdits alimentaires chez les musulmans.
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